Autrefois assez obscure et surtout adressé à un public de niche, le rogue-like, ou du moins, les multiples inspirations du Rogue originel, sont revenus depuis quelques années dans le cœur et les mains des joueurs, au travers une multitudes de jeux téléchargeables, principalement sur PC, avec en lice – ou dans l’esprit déviant de votre serviteur – Dungeons of Dredmor, Rogue Legacy, The Binding of Isaac, Faster Than Light… Tous les citer serait difficile, et encore plus si on commence à s’attaquer aux consoles, qui n’ont pas à rougir non plus. Une masse de titres, pas mal de perles et de clones et, parfois, d’excellentes surprises. Je veux bien entendu parler, vous vous en doutez, de Risk of Rain, objet du présent bout de papier, sinon pourquoi diable aurais-je mis un titre et une introduction pareille? Bref. Risk of Rain est née de l’imagination de deux étudiants, Duncan Drummond et Paul Morse, et de l’aide de backers de Kickstarter. Une campagne tranquille, dirons nous, puisque quelques 30000 dollars ont été récoltés par rapport aux 7000 demandés, de quoi acheter la licence commerciale du dernier GameMaker et s’offrir les services de Chris Christodoulou pour composer la musique. Rien de très extravaguant jusque là, mais une fois le jeu lancé, les choses sont toutes autres. Attention, coup de cœur et une note associée assumée.
Voilà une bien fâcheuse situation. Alors que notre vaisseau de fret voyageait tranquillement et sans prétention aucune dans l’espace intersidéral, une vile entité, apparemment prisonnière au sein de l’engin, pour des raisons que l’on imagine se rapprocher d’un ou plusieurs crimes, étonnement affublée une grosse épée et toujours plein de mauvaises intentions, réussit à s’échapper et se charge expressément de mettre la pagaille, forçant le vaisseau à se crasher sur une planète inconnue et très hostile envers les quelques rescapés que nous sommes. Notre objectif est alors très clair : survivre et trouver un moyen de quitter ce caillou et ses habitants qui ne veulent vous voir nul part ailleurs que par terre, mort, à se faire bouffer par des asticots extraterrestres… Ces derniers faisant – pour l’anecdote – la taille d’un building et possèdent une peau de magma. Et il ne s’agit que d’un exemple parmi tant d’autres de cette faune aux multiples tailles qui nous attend.
Comme indiqué plus haut, Risk of Rain puise son concept dans le roguelike, mais également dans une multitudes d’autres genres, avec en tête le bon vieux plateformer à tendance shooter des familles : d’immenses niveaux à explorer, des cordes, bumpers et autres échelles pour atteindre les endroits les plus escarpés. Ces mondes ne sont pas générés aléatoirement, et ne proposent à chaque partie que quelques modifications sommaires, limitant ou permettant l’accès à certaines zones. Un seul et unique but sur lequel se focaliser, à savoir un téléporteur lui placé au pif, qui, une fois activé, invoquera le boss et une petite fournée d’ennemis en cadeau bonus, et ce pendant une période déterminée. Une fois cette vague passée, on pourra passer au tableau suivant, et recommencer le même procédé. Mais avant cela, il faudra affronter une horde d’ennemis, gages d’XP et d’argent, qui surgissent de manière infinie et plus ou moins sporadique, mais toujours au moment où l’on a le moins besoin d’eux dans nos pattes. Heureusement nous avons de quoi les accueillir et répliquer. Prenons une manette de Xbox 360, accessoire indispensable pour profiter pleinement du jeu : pour chaque gâchette et bouton de tranche correspondent une attaque ou une capacité différente, sans possibilité aucune de la changer, la personnaliser ou la faire évoluer. Quatre compétences dont nous sommes obligés de nous accommoder, d’autant qu’elles demandent un temps de cast de plusieurs secondes, comme dans certains MOBA. On devra également compter sur les joies de l’aléatoire pour récupérer différents objets tombés ici et là lors du crash, objets de soutien dont il faudra rapidement connaître leurs pouvoirs. Ceux-ci sont disponibles de différentes manières, mais principalement par l’achat – à l’aveugle – dans des coffres, dans des capsules ou encore via des autels qui ne lâcheront pas toujours quelque chose. On dénombre deux types d’objets : les passifs, cumulables à l’infini, comportent différents boosts de statistiques, des armes telles des lances missiles, ou encore toute une panoplie d’indispensables aides aux soins, et ensuite les outils utilisables, reconnaissables par leur macaron orange “USE”, activables n’importe quand mais qui exigent un temps de recharge, eux aussi. A consommer avec tact et parcimonie donc. Tout cela ne sera pas de trop face au bestiaire que nous allons avoir l’horreur d’affronter. La taille de notre personnage, présenté en tout petit au milieu de l’écran, est parfaitement choisie pour apprécier celle des différents mobs, pour la plupart deux fois plus grands que nous, mais aussi des boss, aussi énormes que puissants.
Vient une interrogation. Puisque les ennemis apparaissent sans arrêt, autant rester dans un même monde pendant un moment pour monter en niveaux – dans la classique limite du ratio niveau/expérience – histoire d’être tranquille pour les prochains tableaux. C’est ici qu’intervient le pire ennemi dans Risk of Rain : le temps. Celui-ci est indiqué à l’écran par une énorme barre découpée en plusieurs paliers. A chaque nouvelle partie débutée, ce sablier, tout comme l’équipement et le niveau du joueur, démarre de zéro. A intervalles réguliers – toutes les cinq minutes en mode normal – un palier est passé, et une montée de la difficulté est appliquée au jeu : les ennemis voient leurs barres d’énergies augmentées, ils spawnent en bien plus grand nombres, font beaucoup, beaucoup plus mal, et sont souvent affublés de nouveaux pouvoirs comme une protection électrique ou un lance missiles. Toute la beauté du jeu réside donc dans cette équation impliquant votre niveau, le temps écoulé, le monde dans lequel vous vous situez, et les objets que vous avez récupéré. Un mauvais équilibre de ces variables ne vous amènera que des problèmes, voir une mort inévitable et douloureuse. Et si jamais vous êtes dans une situation confortable, méfiez vous, Risk of Rain n’aime pas cela, et n’hésitera pas à vous balancer trente ennemis et quelques boss en même temps. Le pire est de se retrouver au sein d’un tas de sprites ennemis, car c’est ici que votre barre de vie sera le plus rapidement liquidée. Une gestion des collisions ? Et puis quoi encore.
On le comprendra rapidement à nos dépends : Risk of Rain est un titre nerveux, difficile, pas mal exigeant, et qui ne pardonnera jamais les plus lents. Le jeu n’est pas frustrant pour autant, du fait de la durée totale d’une partie et des conséquences d’une mort bête et méchante. Il ne faudra en effet pas plus d’une seule heure et cinq mondes pour voir le générique de fin, mais compte tenu de la fessée continuelle que l’on prend au bout d’un quart d’heure, “boucler” le jeu une première fois demandera beaucoup d’entraînement et d’acharnement, et ceci dans la difficulté la plus faible. Il ne s’agit pourtant là que du commencement : compte tenu du caractère aléatoire du jeu, la rejouabilité est excellente et propulsée par la quête de nouveaux objets (une centaine au total), déblocables à la suite de la réussite de nombreux défis. De plus, il est important de noter, pour varier les plaisirs, que pas moins de dix classes de personnages sont jouables : mise à part le soldat conventionnel fourni dès le départ, rapide mais guère puissant, il est possible de jouer par exemple un ingénieur et ses multiples outils, un puissant et imposant robot, lent mais puissant, ou encore un mercenaire, as du corps à corps grâce à son épée et ses esquives. Chaque classe est particulièrement équilibrée, et saura tirer son épingle du jeu, aussi bien en solo qu’en équipe. Car si Risk of Rain est un jeu très agréable en solitaire, il est carrément génial accompagné de trois amis au maximum, aussi bien en local qu’en ligne. Ici, la coopération sera de mise, et les ressources mises à disposition – dont le nombre de bouge pas d’un pouce par rapport à une partie à un joueur – devront être partagées au mieux. Le nombre d’ennemis ainsi que la difficulté sont revus à la hausse, et c’est le jeu qui s’occupe de gérer le partage de l’argent et de l’XP afin de maintenir un équilibre parfait entre chaque participant. Rester en vie et surtout groupés reste primordial, donc pas d’actes héroïques insensés. Surtout dans le niveau de difficulté maximal, LE défi ultime. Il est sympathique de noter que le titre, s’est vu ajouté, début mai 2014, d’une petite nouveauté pour les amateurs de séances masochistes : des artefacts, de grosses pierres trouvables suite à la résolution de petites énigmes ou tout simplement en cherchant bien qui, une fois activés et pourquoi pas cumulés avant le début des festivités, permettent de pimenter les parties et le score final en modifiant quelques paramètres de base du jeu. Rien de tel, par exemple, que d’affronter en continu des ennemis classés “élite” qui décèdent en une dizaine de boules meurtrières et explosives. Un chouette ajout, donc.