Plus de 14 ans de développement ! Fier d’avoir remporté tous les ans le prix du vaporware de l’année, le Duke revient enfin sur nos ordinateurs et consoles. Après avoir changé quatre fois d’éditeurs et presque autant de développeurs, Duke Nukem Forever met fin à son statut d’arlésienne du jeu vidéo pour enfin inonder le commerce. Après autant d’années de gestation, il est évident qu’il ne peut plus être rentable, il n’est désormais là que pour lancer une nouvelle série de jeux Duke Nukem. Pourtant, il a pour lui son incroyable aura exacerbée au fil des ans. Certains l’ont pré-commandé il y a de cela plus de dix ans. Ont-ils été récompensés ?
Duke Nukem Forever s’ouvre sur la scène finale de Duke Nukem 3D – dernier titre Duke Nukem en vue à la première personne. Comme dans nos souvenirs, Duke est confronté à l’Empereur Cycloïde qu’il abat sans trop de mal avant de l’humilier comme il en a l’habitude. La caméra s’éloigne pour laisser le champ à une télévision : Duke Nukem, dans son fauteuil accompagné de deux demoiselles entre ses jambes, finissait son propre jeu. Des années ont passé depuis le sauvetage du monde : Duke Nukem est devenu l’homme le plus connu et désiré de la planète. Peut-être même le plus riche. Tout lui sourit jusqu’à ce qu’un vaisseau mère extraterrestre ne fasse son apparition dans le ciel de Las Vegas. Aussitôt contacté par le président américain, Duke Nukem est muselé. Les aliens sont désormais venus en amis et désirent vivre en paix avec la race humaine. Duke Nukem n’en croit pas un mot et il a bien raison : les femmes humaines, et notamment les jumelles Holstom qui vivent avec lui, sont kidnappées sous ses yeux pour enfanter les rejetons aliens. Ni une ni deux, Duke Nukem n’écoutant que le dessous de sa ceinture, décide de sauver ses gonzesses et accessoirement le monde de l’attaque cycloïde.
Un scénario oubliant toute finesse, servant de prétexte à un jeu qui ne l’est guère davantage. Le principal attrait de Duke Nukem, avant même son gameplay ou sa réalisation, est Duke Nukem lui-même. Représentant vivant de l’homme physiquement parfait, désiré par toutes les femmes et invincible, il voue un culte à sa personne. Il ne rate pas une occasion pour se lancer des fleurs ou s’admirer au détour d’un miroir dans les toilettes. Il n’a peur de rien et surtout il est persuadé d’être le meilleur, ce qui donne des dialogues et commentaires ô combien narcissiques. Ce qui ajoute une couche à l’humour sanguinolent et souvent – pour ne pas dire tout le temps – trash de Duke. « It’s time to kick ass and chew bubble gum, and I’m all outta gum ! » symbolise à la fois l’intégration de nombreuses références cinématographiques (ici « Invasion Los Angeles » de John Carpenter) et toute la philosophie de Duke Nukem, philosophie parfaitement assumée du début à la fin du titre. Comme c’était déjà le cas dans l’épisode précédent, le graveleux se veut omniprésent. Que ce soit le jeu s’ouvrant sur le soulagement du héros au-dessus d’un urinoir, le club de strip-tease culte – élément récurrent de la série – ou les allusions salaces faites durant les cinématiques mais aussi et surtout pendant les phases de jeu, Duke Nukem Forever ne lésine pas sur l’outrancier.
Gearbox a mis sur le projet de très nombreux transfuges des équipes 3D Realms ayant déjà œuvré soit sur l’épisode 3D soit sur le Forever à différentes étapes de sa conception. Autant dire que l’esprit Duke a su perdurer au sein du développement pour exploser en ce sacro-saint mois de juin 2011. A croire d’ailleurs que chacun y est allé de sa petite touche tant les détails affluent. C’est bien simple, une très grande partie des éléments du décor peut être utilisée, bousculée ou détruite. Les lavabos, les boules de billard, les boutons, les boissons, la nourriture, etc… et soyez assurés qu’une animation a été prévue pour accompagner votre curiosité. C’en est tellement fascinant qu’à chaque nouvelle salle, le premier objectif qui vient à l’esprit du joueur est d’assouvir sa curiosité. Il est donc toujours possible de se doper aux stéroïdes, mais aussi de boire des bières, de fumer des cigares, de regarder des magazines porno et de jouer à différents mini-jeux, loin d’être parfaits mais qui ont le mérite de diversifier l’aventure – palet, flipper, machines à sous, … L’aventure linéaire de Duke se fait donc au travers de décors regorgeant de secrets que l’habitué de la série aimera découvrir et redécouvrir, d’autant que les découvertes et tests s’accompagnent très souvent d’un bon mot de Duke. Et que ce soit par Don St. John, le doubleur américain, ou par Daniel Beretta, le doubleur français qui prête également sa voix à Arnold Schwarzenegger, les répliques font, encore une fois, mouche.
A ajouter à cela une absence totale de réflexion quant au scénario et vous obtenez un jeu décomplexé, débordant de clins d’œil, d’humour trash et surtout qui ne se prend pas la tête, et par extension celle du joueur. Tandis que de nos jours les grosses machines bien huilées du FPS misent tout sur une mise en scène qui en mette plein la vue et une histoire de terrorisme si austère qu’elle est oubliée avant même d’avoir atteint le générique de fin, Duke Nukem Forever propose de redécouvrir les FPS d’antan. Ceux où le héros n’avait pas besoin d’être soit la victime d’un complot planétaire ou de disposer de troubles mentaux remontant à l’enfance. Et si le scénario tient sans problème sur un timbre poste, il le fait fièrement dans le but d’offrir un FPS défouloir et pleinement assumé, un genre tombé en désuétude depuis quelques années et dont Duke était un ambassadeur par le passé. Duke rentre dans le lard de ses ennemis, les porcoflics, démolit des bâtiments entiers, s’arrête dans des patelins perdus comme MorningWood, le tout aidé par ses railguns, lance-roquettes, éradiqueurs et autres fusils réducteurs qui ont contribué à sa renommée mondiale. De la finesse à l’état pur. Heureusement, Gearbox a bien compris que pour sauver DNF, il fallait tout miser sur son ambiance sous stéroïde et son personnage principal.
Sortir un jeu qui a végété pendant une dizaine d’années, passant de moteur en moteur, d’équipes en équipes, est une entreprise risquée tant les fondations ne sont pas solides. Ceci a un impact évident sur la réalisation technique tout simplement dépassée de nombreuses années. Réutilisant l’Unreal Engine 3, DNF ne tient absolument pas la comparaison avec les derniers titres du genre. Il passe même en raison de certains décors pour un jeu obsolète, datant de la génération précédente. Les animations sont loin d’être parfaites, offrant bugs de collision sur bugs de collision, et le level design a clairement vieilli. Même le côté légèrement rétro de ce dernier passe plutôt bien vu l’ambiance, il est évident que cette indulgence n’est valable que pour DNF. L’IA n’ayant pas bougé d’un iota également, c’est à se demander si au final, pour assurer la sortie du titre, Gearbox ne s’est pas fixé comme objectif de proposer un Duke Nukem 3D remis au goût du jour. Tous les éléments du passé se retrouvent donc ici, les bons comme les mauvais. A l’exception des espaces ouverts qui ont tout simplement disparu. Ils avaient fortement contribué au succès de DF 3D, pour leur côté novateur par rapport à la concurrence. Mais toujours dans l’optique de diminuer les temps de développement, ils semblent avoir été sacrifiés en cours de route.
Le jeu a aussi vu sa difficulté nivelée vers le bas en intégrant une jauge d’égo – jauge de vie – remontant d’elle-même, invention démocratisée depuis ce cher Halo. Fini donc les trousses de soin savamment planquées dans les décors. Duke ne peut plus qu’utiliser que deux armes en même temps, toujours comme Halo et comme de nombreux autres homologues du genre. Ces deux points venant sûrement ajouter un minimum de stratégie à des joutes qui n’en demandaient pas tant. A côté de cela, de l’adresse ne sera pas de trop pour se sortir des quelques phases de plateforme, intégrée pour coller au modèle. Loin d’être parfaites, elles ont le mérite d’apporter un léger vent de fraîcheur. Tout comme les passages véhiculés, les moments de miniaturisation ou les chapitres sous-marins. Comme écrit plus haut, Duke Nukem Forever, c’est vingt-trois chapitres, sans compter les sous-chapitres, assez maladroitement découpés, entrecoupés de temps de chargement assez scandaleux, mais aux décors fidèles à l’univers Duke Nukem. Le multijoueur, pourtant important aux yeux de Gearbox, ne soutient pas la comparaison avec l’aventure solo, et ce malgré l’intéressante idée de décorer la maison de Duke au fil des parties et de l’expérience engrangée.
Et c’est bien là le principal serions-nous tentés de d’écrire. Loin d’être immonde, l’aspect technique ne restera pas dans les annales, à l’inverse des répliques bien beaufs du Duke. Fier de son humour et de ses babes aussi idiotes que désirables, Duke Nukem Forever emmerde le monde du FPS de 2011 pour offrir un gameplay old school, « comme à l’époque », emmitouflé dans une doudoune de fan service à outrance. Il est certes nécessaire d’être nostalgique des années 90, de prendre plaisir à boxer des mamelons sortant des murs ou de rire des vannes de Duke (« écarte tes fesses que je marque un but ») mais quel pied de se replonger dans cette ambiance. Le prochain aura pour obligation de vivre avec son temps, mais d’ici là, profitons donc de cette pépite jubilatoire et irrévérencieuse.
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