Composition : Nobuo Uematsu | Arrangements : Shiro Hamaguchi
Interprétation : Shinko Ogata
Année de sortie : 2000 (réédité en 2004)
Nombre de CD : 1
Nombre de pistes : 13
Même si l’exercice n’est pas démocratisé pour chaque production Square Enix, bon nombre de ses jeux ont bénéficié du traitement Piano Collections. La série Final Fantasy bien entendu mais également les Kingdom Hearts et de façon plus surprenante, le plus modeste Nier. Si l’histoire a montré que certaines revisites au piano arrivaient à se tailler la part du lion en évinçant de façon plus qu’évidente les morceaux originaux – citons au hasard des « Aerith’s Theme » et « Tifa’s Theme » de Final Fantasy VII et le choix de leurs pendants piano au sein de la B.O. d’Advent Children est loin d’être un hasard – d’autres frasques acoustiques se révèlent bien plus anecdotiques.
Pour le cas de Final Fantasy VIII, on atteint un peu le juste milieu. Difficile de trouver au sein de Piano Collections des versions plus fédératrices que les originales. En revanche, l’intérêt est bel et bien de mise encore une fois car il faut voir en lui un excellent à-côté alternatif, à l’inverse d’un Fithos Lusec Wicos Vinosec qui se présentait davantage vers un achèvement.
Globalement, les treize titres présents – où l’ensemble de la tracklist joue le jeu de l’exercice sans ajout inutile de morceaux tirés de l’OST originelle – n’enfoncent pas le clou en sublimant les éléments mis en place. Au contraire, ils se présentent de façon différente et c’est bien là où la galette puise son intérêt. Malheureusement, voilà un parti-pris qui rend la destination du disque plus confidentielle, un objet de fan die-hard pour certains, un objet d’analyse sonore de mélomane en herbe pour d’autres. Passons le premier aspect tenant bien plus de la collectionnite aiguë au profit du second.
La sélection choisie se révèle à double tranchant. Le premier côté est révélateur d’évidence : les morceaux originels se prêtaient sans mal à l’exercice du piano, c’est sans étonnement qu’on les voit pointer le bout de leur truffe ici. On découvre ainsi des « Eyes On Me », « The Oath » et « Fisherman’s Horizon » amputés de toute voix où le minimalisme joue un rôle aussi intime que touchant. En revanche, certains de ceux-là surprendront malgré tout, non pas pour leur présence mais pour le résultat. Qui eut cru que « Shuffle Or Boogie », le thème du jeu de cartes, imbuvable sur OST, puisse se revêtir d’une telle élégance ? Et il n’y a pas à dire, faites disparaître les insupportables claquements de main et vous changez le monde. Même si au final, c’est bien plus vers cette ambiance musicale qui fait penser à un fond musical d’une scène de jeu de blackjack au sein d’un piano bar qui aurait appartenu à un vieux film retro américain qu’on reste le plus sensible. De la même manière, « Slide Show Part 2 » se démarque. Autant le contexte de film montrant une scène bien ballotte ne change pas d’un iota, la subtilité vient davantage du filtre exhibé. Sepia cliquetant et cinéma muet pour un programme sonore fort savoureux. Même « Blue Fields », pas si dur à imaginer tout en piano, étonne pour son changement vraiment radical où l’on s’imagine plus observer les cavalcades à l’intensité crescendo-decrescendo d’un couple de danseurs en lieu et place des frasques piétonnes à travers le monde – dernier point qu’on se sera bien plus rendu compte dans l’album orchestral que dans l’OST où cet aspect est moins évident.
Là où le Piano Collections se revêtit de plus d’importance, c’est dans des choix moins évidents qui surprennent véritablement l’auditeur tant les bases ne laissaient pas présager la configuration piano classique solitaire. Difficile effectivement d’imaginer que ce dernier puisse se frotter à un « Succession Of Witches ». Encore moins d’offrir un résultat valable tant l’originale est marquante et se serait sans doute prêtée davantage de richesse musicale comme le propose l’orchestral plutôt que l’acoustique. Et pourtant, cette version s’avère terriblement fascinante. L’aspect inquiétant se trouve voilà par davantage de mystère et la prédominance de légèreté dans le toucher ne fait que rendre plus grave les rares moments où l’attaque est privilégiée. Très différent des sentiments originels mais étonnamment crédible et marquant d’une autre façon. Dans les plus notables dans ce même genre de catégorie, « Find Your Way » s’en sort avec les honneurs. Tirant des atmosphères des ambiances tissées en toile de fond sur OST, on arrive là à un véritable exercice de style où l’esprit d’improvisation n’est vraiment pas loin, permettant ainsi habilement de faire oublier la perte de profondeur due à la configuration piano. Fort malin.
Même si l’esprit de finalité n’est pas là comme c’était le cas avec Fithos Lusec Wicos Vinosec, ce Piano Collections arrive à mettre lui aussi en valeur une autre volonté de Final Fantasy VIII : son net penchant vers l’american touch. L’intimité du piano seul arrive à révéler différentes facettes propres à l’Amérique : le cinéma retro, les tendances jazzy dans les quasi-improvisations, quelques swings inspirés de musiques noires américaines… On salue également les prises de risques dans la tracklist, le capital surprise ne rendant ces morceaux que plus marquants. Malheureusement, contrairement à certains moments des autres Piano Collections de Square Enix, il manque un on-ne-sait-quoi de fédérateur, ce qui ne le rabaisse qu’à simple à-côté alternatif qui parlera davantage aux collectionneurs, mélomanes curieux ou autres oreilles sensibles du piano et non un indispensable que tout sympathisant du jeu se doit d’écouter.