Se tenait le 12, 13 et 14 novembre 2013, au Châtelet, Théâtre Musical de Paris, en exclusivité Européenne, l’opéra The End. Bien sûr, Archaic, en la présence de Lolita, se devait d’y être ! Pour ceux qui ont bonne mémoire, je vous en avais déjà parlé dans mon compte-rendu de la Japan-Expo. Pour les amnésiques ou les nouveaux :
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Vocaloid est un logiciel qui permet de synthétiser des voix numériques. Il est développé par la société Yamaha. Le logiciel possède une banque de voix de synthèse dont la plus célèbre est Miku Hatsune.
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[accordion_item title=’Qui est Miku Hatsune ?’]
Miku Hatsune est une voix créée à l’aide d’ordinateurs par Crypton Future Media. Née en 2007, c’est une adolescente de 16 ans d’1m58 pour 42 kg. Elle affectionne beaucoup le turquoise et son totem est un negi (poireau). Depuis 2009, elle est l’héroïne des jeux vidéo – Hatsune Miku : Project Diva – développés par SEGA en collaboration avec Crypton Future Media. Cet opéra est né de la collaboration de beaucoup d’acteurs d’horizons différents et parfois inattendus.
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Keiichiro Shibuya – Musique, conception et mise en scène –
Né en 1973, à Tokyo, il fonde, en 2002, le label ATAK, spécialisé dans la musique électronique. En 2006, avec l’aide de Takashi Ikegami, il crée un spectacle nommé Filmachine qui traversera les frontières jusqu’en Allemagne, Belgique ou même en France. En 2007, il perd sa femme, avec qui il a beaucoup composé, ce qui influence abondamment ses nouvelles créations. The End voit le jour en 2012, avec sa première représentation au Yamaguchi Center for Arts and Media.
YKBX – Mise en scène et vidéo –
Formé à Osaka, il part finir sa formation aux Etats-Unis. De retour au Japon, il est engagé par Nintendo, où il devient directeur image. C’est lui qui a rajouté à Miku un petit côté cyborg en remaniant ses traits.
Shohei Shigematsu – scénographie –
Evala – Sound Design –
Pinocchio P – Programme Vocaloïd –
Masakazu Ito – Lumière –
Louis Vuitton (Marc Jacobs) – Costume –
Toshiki Okada – Conception original du livret –
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Dans cet opéra, Miku Hatsune découvre la mort. Tandis qu’elle est surtout connue dans un registre Kawaii/Pop, sur des airs joyeux et entraînants, on la découvre, ici, dans un tout autre univers. Dans la plupart des créations, Miku est représenté dans des tenues à tendance magical girl turquoise (ou éventuellement rose sakura) affublée de son éternel poireau. Dans The End, exit le turquoise et le rose, la maison Louis Vuitton, en la personne de Marc Jacobs, l’habille d’une tenue plutôt sexy à damier noir et blanc. Comme si Miku avait soudain grandi. Après l’insouciant bonheur de la jeunesse, elle était maintenant confrontée à des problèmes d’adultes : la mort, la fin, la disparition de l’autre, la solitude et l’abandon.
Mon souhait était de créer quelque chose que les enfants pourraient prendre plaisir à entendre, et qui, en même temps, serait tellement délirant que les adultes n’y comprendraient rien.
Souhait réalisé pour Shibuya-San. Malgré tous mes efforts, je n’ai rien compris. Malgré une place au centre de l’orchestre – catégorie 1 – il restait plus que délicat d’accéder au sous-titrage français affiché sur des écrans annexes – Opéra en Japonais évidemment, au sous-titrage anglais inclus dans le code source. Soit trop à gauche ou trop à droite, donc presque totalement caché par les personnes en face – les sièges sont installés en quinconce – soit trop au-dessus de la scène, empêchant de regarder en même temps ce qui se passait sur scène. Quand par bonheur, vous trouviez une position adéquate, vous vous rendiez alors compte que les textes en français étaient fortement en retard sur l’image, ce qui n’aide vraiment pas à la compréhension ! Néanmoins, je reste quelque peu sceptique sur l’accessibilité aux enfants : Miku Hatsune attire généralement, en premier, les plus jeunes d’entre nous – mais pas seulement, hein – pourtant, ici, l’histoire reste relativement abstraite, et les personnages ne sont pas tous très avenants. Si les voix électroniques des Vocaloïd me sont habituelles et plutôt agréables, ici la voix du lapin blanc (!), compagnon de chambre de Miku, devient passablement irritante.
La scène figure la chambre de Miku, au sein de laquelle est campée une maison où je me trouve tapant sur ma machine à écrire pour rédiger l’histoire en même temps que l’action se déroule.
Dans cet univers intimiste – sa chambre – on découvre une Miku tourmentée. La présence de Keiichiro Shibuya sur scène apporte un réel plus à la représentation en y ancrant un peu de réalité – tout le reste n’étant que virtuel et donc projeté. Les pseudo-interactions entre Miku et Shibuya-San, facilitent également l’empathie du spectateur envers Miku, la rendant plus réelle, elle, qui n’est finalement qu’une suite de 0 et de 1 …
Il est plus intéressant de jouer des opéras numériques comme The End dans des salles d’opéra traditionnelles parce que le contraste entre les écrans ou les baffles et le théâtre y est prononcé.
Même si Miku Hatsune est le personnage principal de l’histoire, elle n’est pas là pour attirer : elle est mise en scène de manière décalée de son style habituel, car elle est plus un instrument pour Shibuya-San qu’une tête d’affiche – comme au cinéma. Le public visé par Keiichiro Shibuya est certes la caste des enfants, comme il aime à le dire, une jeune génération plus habituée aux jeux vidéo et à arpenter la toile, qu’au théâtre traditionnel comme celui du Châtelet, mais ce choix n’est pas anodin non plus, car la programmation au Théâtre Musical de Paris est très hétéroclite, et possède une population de fidèles spectateurs friands d’œuvres nouvelles. D’autre part, le Châtelet possède une architecture traditionnelle qui lui confère une acoustique extraordinaire. Reconnaître une représentation de The Opera, c’est apercevoir devant le Théâtre du Châtelet des cars remplis de touristes, remplis de lolita et cosplayeuses Miku … Néanmoins, parmi les jeunes fan-boy, cosplayeuses et lolita, en marge des journalistes – à majorité nippons – se dessinaient nombres de silhouettes ayant passé la cinquantaine, au style vestimentaire plus proche des créations de Marc Jacobs que de celles de Pimkie. Keiichiro Shibuya a réussi, avec son opéra, à faire se côtoyer dans une même salle, des univers différents. Plus encore, il a réussi –ou pas – à leurs transmettre le même message, alors que ces univers ont habituellement tant de mal à se comprendre.
Alors, que l’on construit toujours plus de salles de spectacles à l’acoustique et à l’architecture moderne toujours plus contrôlée – ou maîtrisée, Keiichiro Shibuya a, lui, fait le choix de ce théâtre ancien. Hormis, le côté marketing – le Théâtre Musical de Paris propose nombres d’œuvres originales à un public ouvert – c’est un choix singulier, mais raisonné. Le Châtelet a une acoustique d’une qualité étonnante, le contraste entre l’ancien de l’architecture et la décoration de la salle et la projection sur scène extrêmement moderne apporte un autre regard au spectateur. Avec ces représentations parisiennes, c’est la rencontre entre le passé – le
théâtre du Châtelet – et l’avenir – l’opéra en lui-même – , Keiichiro Shibuya passe son temps à jouer avec ses deux oppositions, même à l’intérieur de son opéra, en utilisant des sons et des personnages modernes, mais tout en gardant les codes ancestraux de l’opéra.
Le coup de gueule de Lolita
En bonne fan de Vocaloïd et de Miku, j’ai acheté ma place très rapidement après la Japan Expo, où l’événement a été annoncé (le 9 juillet pour une ouverture à la vente en mai). Deux dates proposées, mais bien évidemment, autant s’offrir la première européenne. Autant dire que la déception a été grande quand j’ai appris la veille, qu’une date supplémentaire avait été ajoutée… ce même soir, soit un jour plus tôt ! Cette indélicatesse pourrait être passablement excusable par la présence de Keiichiro Shibuya, mais une simple proposition d’échange de date à l’ouverture de ladite nouvelle date aurait été plus correcte. La situation devient, cependant, complètement indécente lorsqu’on apprend que l’opéra est retransmise, en live, de manière totalement gratuite sur internet et est même disponible depuis cette date (et jusqu’au 12 mai 2014) toujours gratuitement. Peut-être suis-je trop vieux jeux (pour ne pas dire archaïque…), mais n’aurait-il pas été plus correct à l’égard des personnes qui ont acheté un billet, quel qu’en soit le prix – le prix des places étant de 5 à 45€ en fonction de la catégorie – d’attendre la fin des représentations – soit donc trois jours – pour mettre la retransmission de l’opéra en ligne ?
Le petit plus de Lolita
Le passage dans la boutique du Théâtre étant obligatoire pour tout fanboy ou fangirl (oui ?), je suis passée en caisse juste devant la maman de Shibuya-San, au demeurant très fière de sa progéniture car c’est avec un grand bol de fierté dans la voix et les yeux qu’elle a annoncé au vendeur dans un français parfait « c’est mon fils ! ». Tandis que j’attendais patiemment l’ouverture de la salle, Keiichiro Shibuya a choisi de répondre à une interview à 1 mètre du public, ce qui fait toujours son petit effet.
Même si l’univers de Shibuya-San, et l’interprétation qu’il propose ici, sont intéressants, il est bien trop abstrait, si bien qu’on finit par s’y noyer… De plus, les Fan de Miku se retrouvent plus que déboussolés – même si j’allais voir cet opéra, sans attente particulière, hormis celle d’être surprise – je suis resté sur ma faim quant à l’utilisation de l’image de Miku, et l’histoire en elle-même. Peut-être suis-je trop adulte, ou trop blasée, ayant côtoyé plus d’une fois l’univers de la mort, mais je reste insensible à ce qu’a voulu nous faire ressentir Keiichiro Shibuya. Et même après un second visionnage, encore merci internet…
En bref, l’opéra est à voir parce qu’il est loin d’être classique, en plus d’être très intéressant dans sa conception. Je reste totalement insensible au fond, incroyable dans sa mise en scène, mais décevant par l’utilisation de l’image de Miku, inappropriée ici.
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[accordion_item title=’Avis de Vidok’]Un concert d’Hatsune Miku ? Génial. Ah, non : c’est un opéra. Il est audacieux d’utiliser ce personnage désormais emblématique dans un contexte tout autre. Il faut bien prévenir tout le monde : il ne faut pas aborder l’opéra comme si c’était un concert traditionnel. Keiichiro Shibuya ne fait appel à Miku qu’à but marketing, puisqu’il raconte, clairement, son histoire, celle dans laquelle il perd sa femme. Le thème de la mort, omniprésent, déprime dès les premiers instants, d’autant que les bruits (musiques ?) électro agressent les oreilles. Difficile de se concentrer dans cet état, pourtant, les dialogues, très souvent obscurs, requièrent une écoute de tous les instants. L’auteur part dans un trip hermétique, dans lequel il ne laisse entrer les spectateurs que tardivement. En effet, ceux-ci se battent du début à la fin pour espérer rentrer dans le récit. L’expérience est intéressante mais particulièrement frustrante. Décevante pour ceux qui n’auraient pas compris que Miku n’est là que pour l’accroche. Attention donc.
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