Ai-je plus à dire de 2018 par rapport à 2017 ? Pas vraiment en fait. A part que cela ne fait que confirmer que j’ai bien plus d’affinités avec cette génération plutôt que l’ère PS360 précédente que je trouvais dans sa globalité trop pauvre et calibrée. A l’inverse de ce qu’on vit actuellement où prolifération et variété sont deux termes qui résument tout. Deux termes qui amènent des bons points de la même que les mauvais points. De l’excitation pure et dure et un regain d’intérêt certain pour le média qui n’a jamais semblé avoir autant de choses à dire, à montrer et à expérimenter et ce, quel qu’en soit son échelle.
Du gros triple A qui n’aura sans doute jamais semblé aussi calibré dans son modèle de cahier des charges propre à cette génération, à savoir partir sur une base d’action propre à une franchise (beat’em all, TPS ou FPS), lui ajouter un système RPG, le tout dans un monde ouvert où l’exploration est motivée par la quête de collectables amenant expérience et boost un brin artificiel de durée de vie. Il suffit simplement de prendre le gros trio sorti cette année composé de God Of War, Marvel’s Spider-Man et Assassin’s Creed Odyssey – de la même manière, on peut aussi citer le cas à échelle de popularité plus basse de Shadow Of The Tomb Raider ou encore regarder dans le rétro de 2017 avec Horizon Zero Dawn – pour s’en convaincre tant les mécaniques de jeu paraissent extrêmement similaires les uns par rapport aux autres, la principale différence intervenant sur l’équilibrage et la manière dont sont distillés ces divers éléments. Mais au moins peut-on leur reconnaître leur background propre, un soin tout particulier à la narration qui n’aura certainement jamais été aussi cinématographique et surtout, une technique totalement barjot, permettant ainsi de proposer des sensations de jeu et réelle expérience qui me paraît quand même moins planplan et prévisible que les blockbusters précédents. Ces gros titres d’ailleurs, aux sorties plus éparses que sur PS360 qui avait de plus en plus tendance à partir vers l’annualisation non dénuée de bâclages en tout genre, font plaisir à voir débouler dans le paysage vidéo-ludique tant on ne les avait pas forcément beaucoup vu sur cette current gen. Et alors qu’on parle de passage à une nouvelle génération où les nouvelles machines seront sans doute présentées d’ici le prochain E3, il est quand même grand temps de voir sortir ces gros prétendants qui tenteraient de mettre les PS4 et Xbox One à genoux d’un point de vue technique. Et vu ce qu’il s’est annoncé au grand salon de Los Angeles cette année, la génération actuelle n’est pas encore morte malgré que les joueurs commencent à parler de PS5… Et d’une potentielle nouvelle machine de Microsoft. Parce que le constructeur américain a su s’imposer cette année en salon et s’il se tient à la ligne de conduite qu’il nous a montré, il y a fort à parier qu’il saura sans doute tirer son épingle du jeu à la prochaine génération. Car à défaut d’inciter à revendre sa PS4 au profit d’une Xbox One, il faut admettre qu’il y a comme de la préparation et de volonté de (re)mise en confiance afin de donner les meilleures chances possibles à sa future machine (achat de divers studios rimant comme développement d’exclusivités, développement de certains services tels le Xbox Game Pass qui semble quand même plus racoleur que le PS Now de son concurrent, mise en lumière équivalente des blockbusters et de la scène indépendante, etc). Et ce, tandis que Sony semble toujours aussi conforté dans sa position de gagnant au point que l’excès de confiance laisse transparaître comme une sorte de fainéantise où tout sens de l’audace semble proscrit. Une situation intéressante à voir tant il manquait un peu de concurrence ces dernières années, expliquant peut-être en partie pourquoi les gros blockbusters techniquement ambitieux ont mis tant de temps à débouler. Même si, honnêtement, je trouve ça encore trop prématuré d’avancer à une nouvelle génération tant celle-ci me donne l’impression d’être loin d’avoir tout dit et montré.
Et bien entendu, la scène indépendante qui ne cesse de se montrer gargantuesque. Et surtout variée : on y trouve autant d’expérimentation que de neo retro sentant bon la madeleine de Proust du joueur le plus nostalgique. Et ce, dans diverses échelles de budget, tant pour le développement qu’à la vente. Donnant ainsi une même variété de qualité, du plus loupé ou dispensable à la réussite marquante, en passant par l’entre-deux feux alliant manque d’aboutissement et aspects charmants, voire fascinants. Et amenant également toute la frustration de la prolifération : cela fait quand même un moment que le joueur assidu n’aura ressenti cette impression d’être à la masse et ce, même avec toute la volonté du monde et un budget et temps alloués illimités. Une scène indépendante qui amène toutes les lettres de noblesse à ce cher Nintendo, après des Wii et Wii U peu enclines à les accueillir, qui dore considérablement le blason de la Switch qui bat tous les records. Et ce, même si elle est techniquement à la masse par rapport à Sony et Microsoft. Il suffisait d’aller voir les étalonnages partiellement vides des magasins au lendemain de Noël pour se convaincre que Big N a encore fait des ravages cette année avec sa nouvelle machine, audacieuse dans son concept d’hybridité entre configuration salon et portable. Soulignant par le même temps que Sony a quand même bien loupé le coche avec sa PS Vita qui aurait pu s’inscrire comme complémentaire à la PS3/PS4 d’une manière pas si différente s’il l’avait correctement promu. Ayant moi-même eu cette Switch sous le sapin, je dois bien admettre que du peu que j’ai eu le temps de m’y frotter, je m’en émerveille et offre quelque chose d’optimal pour le jeu indépendant quel que soit son style vis-à-vis de toutes les possibilités qu’elle offre (la config’ salon ou portable, le côté tactile de la tablette, la détection de mouvement des joycons, etc). Seul bémol : le prix souvent excessif vis-à-vis des autres supports et l’habituelle politique Nintendo de proposer « sa console en kit » où l’achat de certains accessoires s’avèrent plus ou moins obligatoire (ne pas proposer le support joycon qui permet de se brancher en USB dans la boîte de la console, vous êtes sérieux ?). Une scène indépendante qui, au final, m’attire de plus en plus, surtout que des éditeurs comme Limited Run Games ou encore Super Rare Games font paraître certains candidats dans des versions boîte à tirage limité. A des prix indécents certes mais l’aspect « collection » qui garantit de ne pas les revendre à perte si l’envie prenait pour X ou Y raison ou cette sécurité de posséder un disque ou une cartouche permettant de jouer même si les stores dématérialisés sont coupés (ce qui pourrait bien arriver lorsque lesdits supports seront considérés comme dépassés et trop peu rentables pour être maintenus) sont des raisons qui me semblent bien suffisantes pour faire chauffer le compte en banque. D’autant plus lorsque la sélection s’avère alléchante en terme de qualité. Il suffit de voir Celeste et Iconoclasts, proposés actuellement par Limited Run Games pour s’en convaincre. Sans doute, dans des styles bien différents, deux des jeux de la scène indépendante qui m’auront le plus fait de l’œil cette année au milieu de Chuchel, Return Of The Obra Dinn, GRIS, Moonlighter, Into The Breach et FAR : Lone Sails. Un nouvel intérêt vis-à-vis du marché qui tombe fort bien dans le sens où Mizakido semble davantage se focaliser actuellement sur le retro que l’indé dont il était pourtant le premier d’entre nous tous à s’intéresser.
Après, bien entendu, je pourrais m’agacer sur d’autres points (les micro-transactions, le côté désagréable de laisser le joueur/consommateur lambda s’exprimer dans tous ses états de troll et/ou de mauvaise foi) mais ce genre de broutilles ne me touche plus spécialement. A part certainement ce point discutable qu’Activision a soulevé avec son remake de Spyro Reignited Trilogy de ne pas proposer l’intégralité de son contenu dans sa version boîte (seul le premier Spyro est entier, les deux autres sont partiels et nécessitent de télécharger le reste sur sa console), ce qui soulève bien des questionnements perplexes, notamment sur cet argument de désactivation des stores des vieux supports que j’ai évoqué précédemment (on aurait donc un disque de jeu qu’on ne pourrait pas jouer dans son entièreté, faute de pouvoir télécharger le reste…). Et franchement, je n’aurais pas eu cette volonté capricieuse et faible de découvrir cette franchise que je ne connaissais qu’en démo à l’époque, nul doute que ça méritait le boycott pur et simple. Ce qui ne change en rien que cela a été un vrai plaisir d’enfin pouvoir faire Spyro The Dragon, dans un remake très propre et réussi de la même manière qu’on avait pu le voir sur Crash Bandicoot N. Sane Trilogy, une bien bonne madeleine de Proust de mes sessions de jeu de fin d’année.
Transition subtile pour en arriver à ce à quoi j’ai bien pu jouer cette année. Beaucoup et peu à la fois, m’étant en réalité beaucoup plus focalisée sur la musique que le jeu vidéo cette année. Dont je vous ai presque tous parlé, les manquants arriveront sans nul doute dans le futur, certains étant déjà finalisés en coulisse d’ailleurs. Avec différentes échelles de qualité, du mauvais, moyen, sympathique, charmant, plaisir nostalgique ou cas vraiment marquants, voire carrément coups de cœur. Ces derniers, tous narratifs d’ailleurs, que je m’en vais un peu vous énumérer.
Entamé en fin d’année, j’ai su prendre mon temps à découvrir le nouveau jeu de Quantic Dream puisque j’ai découvert son dénouement juste avant d’écrire ce bilan. Le poisson ne peut être plus frais donc… Alors que plein de joueurs l’ont gobé d’un trait avec frénésie, je l’ai distillé de manière hachée, préférant privilégier les moments où je pouvais être à fond dedans, arrêtant souvent après une poignée de séquences, s’expliquant par le côté très éprouvant. Parce que je ne l’aurais pas cru mais c’est le titre de David Cage qui m’inspirait le moins lors de ses premières annonces qui m’aura le plus touchée et bouleversée et ce, malgré mon grand attachement pour Heavy Rain. Avec Detroit : Become Human, Quantic Dream a atteint un sommet de maîtrise de son style sur tous ses aspects (techniques, narratifs, mises en scène, transmissions d’émotion, développements de sa thématique aboutissant à une véritable réflexion, digestions de ses influences cinématographiques, etc), proposant ainsi son plus grand jeu à ce jour sans nul doute. Et je pense que j’ai eu la chance d’y jouer au bon moment par rapport à tous ceux qui s’étaient précipités dessus à sa sortie : les faits d’actualité autour des Gilets Jaunes offrent une nouvelle perspective à tout le pan tournant autour de la révolution des androïdes. Certes, les choses ne sont pas pareilles mais je pense que je n’aurais peut-être pas abordé les choses de la même façon, ni même réfléchi à certains détails ou ressenti le même impact en terme d’émotions. Et puis, vu que l’on se situe pile poil dans la thématique des Utopiales 2018, encore plus ou moins fraîche pour moi, voilà qui ajoutait un intérêt accru à cette histoire d’androïdes aussi émouvante que marquante.
Un vrai coup de cœur proprement inattendu que ce visual novel mettant en scène une barmaid d’un établissement un brin miteux d’une ville futuriste. Suivre le quotidien de cette héroïne ordinaire, à servir et discuter avec ces clients, qu’ils soient habitués assidus ou simplement de passage, est proprement fascinant. Car derrière ce dialogue, pur et sans filtre ne manquant parfois pas de crû et de mordant, le jeu dévoile un background et univers foisonnant de détails et de thématiques SF qui n’auront de cesse de vous faire gamberger. Et ce, même si on est uniquement cloisonné entre les quatre murs de son lieu de travail à servir des cocktails et qu’on ne voit donc jamais à quoi bien peut ressembler cette ville qu’on ne cesse de nous décrire. Nul doute qu’accessoirement, VA-11 Hall-A aura amené un intérêt supplémentaire à s’attaquer à Detroit : Become Human tant les deux titres, chacun sous sa propre forme et manière, traitent de thématiques communes. Ajoutez à cela une direction artistique pleine de charme et une OST vraiment excellente et l’on arrivera à la conclusion que VA-11 Hall-A a beau ne pas forcément payer de mine sur le papier, il s’avérera obligatoire pour tout amateur de SF et de visual novel de s’y pencher.
D’ordinaire, je n’aime pas trop me pencher sur une série en la prenant en cours de route. Malgré tout, j’ai fait une exception pour Danganronpa V3 étant donné que ce troisième opus est le seul qui bénéficie d’une localisation française et que chacun des épisodes peuvent être pris indépendamment. Un point d’entrée plus sécuritaire afin d’être certain de maîtriser davantage le sujet au moment d’aborder l’anglais des deux premiers opus. Il est probable que les fans de la série ne portent pas cet épisode dans leur cœur plus qu’un autre, le concept de tuerie narrative digne d’un Battle Royale rencontre les procès de Phoenix Wright n’étant plus aussi rafraîchissant et percutant que dans ses premières heures, il n’empêche que j’ai découvert un univers, un ton entre maturité pas toujours facile à encaisser pour les cœurs sensibles et humour loufoques typiquement japonais et un système qui m’auront franchement botté. Et ce, même si le jeu n’aura de cesse de nous gonfler à bien des moments tant la narration se révèle plutôt molle du genou. Ce qui a au moins l’avantage d’ajouter davantage de relief lorsque les choses s’emballent et deviennent véritablement prenantes et passionnantes.
Virginia est loin d’être une tuerie, qu’il en soit bien clair. En revanche, il a développé tellement de procédés narratifs, d’influence indubitablement lynchienne, particuliers et inhabituels que sa découverte ne peut que marquer. Tout particulièrement pour ce final totalement halluciné et barjot qui mérite bien une petite place dans les « meilleures scènes marquantes du jeu vidéo ». Pas pour son côté culte mais bel et bien pour son caractère aussi expérimental que surréaliste.
Bénéficiant d’une fantrad très bien faite et d’une totale gratuité, il serait bien dommage de ne pas perdre quelques heures sur Doki Doki Literature Club ! Pour la culture et l’expérience tant cette illusion de dating sim en école japonaise au volet technique simpliste a de quoi marquer sur sa façon de briser le quatrième mur. Qui y va bien plus franco dans la démarche qu’un Yoko Taro ou un Hideo Kojima, ce qui ne veut pas dire que ce manque de subtilité et/ou de poésie s’avère maladroit. Au contraire, les émotions que transmettent Doki Doki Literature Club ! s’avèrent profondément malsaines, entre haine viscérale et syndrome de Stockholm. Sans compter que des sujets particulièrement durs sont abordés de manière beaucoup plus violente et crue que ce doux jeu rose et rigolo laisse présager sur le papier.
Maintenant que 2018 est plié, on peut maintenant penser à 2019… Et comme à mon habitude, je regarde les choses d’un regard lointain. Des jeux titillent bien évidemment ma curiosité, comme tous les ans. Et ce, qu’il s’agisse de gros jeux dont je garde un certain Control de Remedy Entertainment depuis l’E3 en ligne de mire ou encore les arlésiennes – promettant leur beau lot de déception – que représentent FFVII Remake et Shenmue III. Ou d’un œil beaucoup plus lointain, les The Last Of Us Part 2 et Cyberpunk 2077 interpellent également. Du côté des indépendants, je reste également curieuse de voir évoluer le nouveau rogue-lite tour par tour, quand bien même ce ne soit pas un style qui me parle beaucoup d’ordinaire, de Terry Cavanagh (VVVVVV, Super Hexagon…), Dicey Dungeons qui semble bien prometteur et audacieux malgré son concept tout bête à base de dés. Mais également un certain Edge Of Eternity du studio français Midgard, entré récemment en accès anticipé, renouant avec le J-RPG traditionnel des ères 32/128 bits à grand renfort de système ATB à la Final Fantasy et système de placement par case qui semble inspiré des Wild Arms 4 et 5. J’attends également de voir ce que vaudra la version Switch de Final Fantasy IX – on connaît Square Enix et les portages foireux – qui justifiera sans doute le fait de m’y replonger confortablement emmitouflée dans la couette si elle s’avère bonne. De la même manière, pour rester dans la nostalgie la plus totale, je ne cache pas que le remake de Crash Team Racing, le Mario Kart de mon enfance quand même, me regarde avec ses yeux de biche. Peu de choses au final, ce qui n’enlève en rien que certaines envies de jeu à faire cette année me taraudent. Parmi elles, on pourra citer que je deviens de plus en plus mûre pour m’attaquer sérieusement à Final Fantasy XV et à Persona 5, de revenir un peu sur la PS3 le temps d’un Majin And The Forsaken Kingdom (un double A qui m’a toujours intriguée) et d’un Okami HD, me replonger dans la découverte tardive de la trilogie des The Longest Journey et que depuis quelques temps, me plonger dans Shadow Hearts me titille également pas mal. Bien entendu, le tout sans aucune garantie que ce soit au final bien fait, ayant tendance à vite en changer. On refera le point l’année prochaine donc !