Le projet des Vengeurs est sur le point d’aboutir. Pour clore les films préparatifs et de présentation, l’histoire du premier Vengeur, Captain America, a été choisie. Toutefois, bien qu’il soit une nécessité, il est évident qu’il s’agit d’un choix difficile. Joe Johnston doit montrer qu’il a les reins suffisamment solides pour disposer du héros et ne pas rater le coche.
Après la chaotique production de Wolfman – Joe Johnston ayant été catapulté sur le tournage pour remplacer Mark Romanek – le réalisateur avait fort à faire pour redorer son blason. Homme que nous n’avions pas vu depuis Hidalgo, et papa de Jumanji et Jurassik Park III, il n’a pas pour habitude de décevoir son public, en offrant à chaque tournage, un produit efficace. Peut-être est-ce une des raisons de son choix en tant que chef d’orchestre. En tout cas, il livre avec Captain America le meilleur film de super héros de 2011. Tout cela commence dès le choix de l’acteur principal, Chris Evans – insipide Johnny Storm dans les deux volets des 4 Fantastiques – qui ici réalise un tour de force à nous rendre totalement empathique pour son personnage, Steve Rogers. Gringalet de son état, il ne rêve que d’aider les autres et servir son pays au cours de la guerre qui l’oppose à l’Allemagne nazie de 1942. Recalé par cinq fois aux phases de recrutement de l’armée, il est repéré par le docteur Erskine (Stanley Tucci). Il est ainsi enrôlé pour participer à un programme expérimental visant à produire de super soldats. Tiraillé entre sa nouvelle image d’ambassadeur de l’armée et son devoir patriotique, Steve Rogers, un peu perdu, amadoue le public. Malgré l’étonnante transformation que le héros subit en cours de film, son étonnante fragilité perdure, grâce à Chris Evans surprenant dans ce rôle qui lui va au final comme un gant.
Mais le personnage de Steve Rogers/Captain America n’est pas le seul à être réussi, puisque la présence extrêmement importante de Howard Stark – le père de Tony Stark/Iron Man et campé par un très bon Dominic Cooper – permet de faire un lien avec les autres films précurseurs des Vengeurs. Marvel aurait en effet pu céder à la facilité en présentant son héros au travers d’une scène contemporaine ; toutefois il n’en est rien puisque le scénario nous envoie tout au long des deux heures de film dans les années 40, en pleine seconde guerre mondiale. Par d’habiles rappels au début et à la fin du film, Joe Johnston se permet de coller à la fresque principale en se concentrant sur la personnalité de son héros. A ce sujet, l’absence d’insistance sur la plastique du héros et les potentielles romances montre bien que ce n’est nullement le point central de l’histoire. Joe Johnston ne se perd ainsi pas dans diverses ramifications. Au casting, nous comptons pourtant Tommy Lee Jones, dans un rôle du gradé bougon – et très drôle – qu’il semble affectionner depuis Men in Black, et Hugo Weaving, dans la peau du redoutable et fou à lier Johann Schmidt/Crâne Rouge qui lui va également comme un gant. Dommage toutefois que le dénouement ne lui fasse pas honneur. N’oublions pas la superbe Hayley Atwell, moins célèbre mais tout aussi importante à l’image.
Le défi était d’autant plus difficile à relever pour les comédiens et leur réalisateur que Captain America est un réel héros national aux Etats-Unis puisque chacun y a grandi en lisant ses aventures. Et même si le patriotisme dont fait preuve Steve Rogers est palpable, il ne faut pas compter sur Joe Johnston pour l’imposer aux spectateurs. Pas l’ombre d’un drapeau ne servant la trame principale ou un symbole gratuit. L’ensemble reste cohérent et constant et évite une surenchère d’américanisme qui aurait pu déplaire au public étranger. Aussi régulier que le rythme de narration, alternant l’action et l’aventure, avec la guerre en toile de fond et sans oublier de très bons passages humoristiques principalement incarnés par Tommy Lee Jones et son étonnant Général Chester Phillips. Certains pourront d’ailleurs reproché à l’ensemble de manquer de combats et d’explosion puisque le focus est placé sur l’évolution de Steve Rogers et non sur son incroyable prestance en combat. Ceux-là devront tout de même reconnaître que nous n’avons pas eu de personnage aussi travaillé et touchant depuis bien longtemps dans une superproduction américaine, d’autant plus adaptée d’un comics. Le format du long-métrage ne se prêtant que difficilement à une évolution complexe. Il faut également relever le sympathique aspect rétro qui se dégage de l’image, nous transportant gentiment dans les années 40 tout en y intégrant de charmants anachronismes sans nous faire sourciller.
Captain America First Avenger se révèle être un film simple mais finalement plus intéressant qu’un Thor, et plus proche de l’intérêt suscité par Iron Man. Si Thor a pu paraître bien lisse aux yeux de quelques exigeants, ils devraient trouver matière à complimenter la production de Joe Johnston qui signe là un film pas parfait – un final assez juste, un léger manque d’action et quelques scènes tout de même caricaturale – mais efficace. Comme il en a l’habitude. Il ne devait pas décevoir. Il ne déçoit pas. Nous sommes désormais prêts pour Les Vengeurs. Ces mêmes vengeurs qui interviennent sitôt le générique de fin achevé…