La comédie au cinéma peut s’afficher sous différents traits. Bienvenue chez les Ch’tis, Prête-moi ta main, Bruce Tout-Puissant, 40 ans toujours puceau, … Hot Fuzz. A chaque pays sa façon de présenter le comique. Provoquer le rire chez le spectateur n’est pas chose aisée et il est rare de rencontrer réellement une œuvre amenant de manière naturelle l’éclat de joie, il est encore plus rare d’en rencontrer une réussissant à l’entretenir. Hot Fuzz, à l’image de Shaun of the Dead, n’a pas l’ambition de faire partie de ces perles. En revanche, il envisage clairement de nous amuser. Ça tombe bien, c’est ce nous lui demandons.
Nicholas Angel est un fonctionnaire de police modèle. De ses classes à son affection aux troupes d’élites d’intervention londoniennes, il n’a jamais cessé d’être le meilleur. Punir le mal pour faire triompher le bien a toujours été une vocation. Depuis sa voiture de police à pédales de son oncle, le petit Nicholas n’a eu qu’un objectif en tête : faire régner l’ordre dans sa ville. Il connaît les meilleurs résultats et le plus grand nombre d’arrestations de toute l’histoire de la police. Alors qu’il devrait être un modèle pour ses collègues, ses derniers ne le voient de la même façon. A cause de lui, ils passent pour des incompétents. Ainsi, ses chefs de service et de département se liguent pour le muter à Sandford sous couvert d’une promotion. Sandford a reçu vingt années consécutives le prix du village le plus sûr d’Angleterre. Taux de criminalité : proche du 0%. Hot Fuzz raconte donc l’histoire du meilleur flic de Londres se retrouvant dans le patelin le plus calme du pays, un patelin où tous les citoyens se connaissent, où les secrets ne le restent jamais très longtemps et où la police locale ignore ce que peut être un meurtre. Pourtant, alors que Nicholas se retrouve affubler des tâches ingrates, mais pourtant quotidiennes aux villages, d’étranges crimes sont commis, tous maquillés en accidents. Alors que l’opinion publique ne cherche pas plus loin que son nez, le lieutenant Angel tente d’élucider ce mystère…
Hot Fuzz débute comme une réelle comédie. Les événements aussi bien passés que présents sont racontés de manière tellement déjantée qu’il est bien entendu impossible d’y croire. Nous sommes forcés de sourire voire même d’en rire tant, il faut bien le dire, c’est idiot. Les anglais adorent présenter les scènes les plus absurdes possibles avec tout le sérieux du monde. Alors quand Nicholas confond son ex petite-amie avec son collègue Bob sans le moindre temps mort et sans arrêt comique, il est difficile de contenir son étonnement et sa satisfaction. Hot Fuzz ne lésine pas sur les scènes improbables parfaitement incrustées dans la vie quotidienne des habitants de Sandford. Cet évident contraste totalement volontaire offre au film un cachet assez particulier que seul Shaun of the Dead avait su offrir. Mais les cinéphiles avertis ne sont guère étonnés puisque le nom d’Edgar Wright se cache derrière les deux œuvres. La même façon de filmer, le même coup de crayon dans le scénario, les mêmes caricatures dans les personnages et décors, le même humour. Le réalisateur transpose tout son décalage dans un nouvel univers plus cohérent que celui datant de 2005. Ainsi, un flic à dos de cheval équipé de multiples fusils à pompes, flingues et mitraillettes, après une heure et demie de film ne fait pas tâche, au contraire même, il réussit à se fondre dans le paysage.
Une fois l’ambiance petit village tranquille et meurtres en série instaurée, le film se déguste comme un bon film d’enquête bien barré. Car si les scènes humoristiques et gags se succèdent, plus ou moins finement – allergiques à l’humour british s’abstenir – l’intrigue n’en demeure pas moins intéressante. En bonne parodie, elle nous donne toutes les clés pour résoudre l’énigme mais se garde bien de nous laisser le faire. Les scénaristes sont loin d’avoir négligé la trame de fond sous prétexte qu’Hot Fuzz était catalogué en tant que comédie. Indices et enquête de fond de canapé sont au programme pour le spectateur. Pas question de poser sa cervelle pendant deux heures. L’œuvre d’Edgar Wright démontre que l’humour n’est pas incompatible avec une histoire bien ficelée. Certains ressors sont bien évidemment bien gros ; néanmoins, ils ne gâchent en rien et contribuent justement à l’indispensable côté comique. Nous nous en ressortons au bout d’un bon moment de film avec une fusillade plus que musclée qui ne pourra s’empêcher de piocher dans des références telles que Point Break et Bad Boys II. Dany, un des personnages principaux de l’histoire, grand fan de cinéma d’action, n’a d’ailleurs de cesse de tenter de convertir Nicholas à quelques uns de ses films (connus et réels) fétiches.
Entre les flics idiots, vicieux et alcooliques du commissariat – c’est une comédie hein –, les grands benêts du supermarché, la tenancière sénile de l’hôtel et le cygne, plus grand fugitif de Sandford, Nicholas a fort à faire pour faire respecter la loi. Il mène d’ailleurs un véritable combat intérieur pour oublier son boulot durant son temps libre, cette dernière servant de raison à sa séparation avec son ex future femme. Hot Fuzz alterne donc les journées de boulot, délirantes et remplies de crimes en tout genre, et les soirées centrées sur le temps libre de Nicholas et Dany. Ces deux-là, que tout oppose, sont coéquipiers. Au fil des minutes, une réelle complicité s’instaure entre les deux hommes, chacun découvrant à quel point l’autre a à lui offrir. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien qu’ils font tous deux l’affiche du film. Attention en revanche à l’impression qu’elle peut donner : les explosions sont plutôt rares en 120 minutes. Nous sommes loin de L’Arme Fatale, mais heureusement elles ne sont pas exclues, pour notre plus grand bonheur.
Sous couvert donc d’une comédie bien à l’anglaise sachant allier les paradoxes, Hot Fuzz réussit à fournir à ses spectateurs un moment totalement déjanté. Cet humour british, pourtant à l’opposé de celui d’un Mister Bean, charme immédiatement. L’épopée campagnarde de notre super flic hypnotise. Et c’est même à se demander si c’en est réellement une comédie, le film sachant tellement bien développer des moments dramatiques, à suspense, drôles et sérieux (assez rares ceux-là, il faut l’accorder). En tout cas, Edgar Wright, et Simon Pegg (Nicholas Angel dans le film) récidivent pour notre plus grand plaisir dans une nouvelle œuvre pleine d’humour et vraiment divertissante. A découvrir d’urgence pour ceux qui ne l’auraient pas déjà fait !