Clovis Cornillac ne cesse de monter dans le cœur des cinéphiles. Après avoir été réellement révélé au grand public avec Brice de Nice, grâce à son talent d’acteur comique inné, il a su varier les expériences pour proposer un panel de personnages tous bien différents. Le voilà dans la peau d’un boxeur dans une réalisation de Julien Séri (Les fils du vent). Ce n’est pas le même budget qu’un Asterix aux Jeux Olympiques, ce n’est pas non plus le même jeu demandé. A l’instar d’un Eden Log, Clovis Cornillac apparaît sous un nouveau jour, un jour qui devrait en étonner plus d’un…
La passion d’Angelo est la boxe thaïlandaise. Non content d’être doué dans cette discipline, il est nommé par son entraîneur pour participer aux championnats. Malheureusement, en raison d’un comportement volatile et violent, il s’en trouve éclipsé au dernier moment au profit de Patrick. Ce dernier, désireux de se venger de l’impulsivité d’Angelo, lui organise un traquenard. Angelo en ressort vivant… lui. Six ans de prison plus tard, et relâché, Angelo n’est plus que l’ombre de lui-même. Il arpente les rues, saoul, sans plus aucune dignité, jusqu’au jour où il rencontre Virginie, serveur et cow-girl de la boîte à Marcus, tenancier, mac et organisateur de combats clandestins de free fight. Pour gagner le cœur de la belle, Angelo va continuer de mettre sa dignité de côté mais en participant en tant que larbin de Marcus aux affrontements qu’il finance. « Angelo le clodo » disparaît alors peu à peu pour redevenir le tant redouté « Scorpion ».
Ce scénario, sous ses faux airs de déjà vu, présente la rédemption d’un homme. Honteux de son passé, honteux de son présent, il tente par tous les moyens de s’offrir un avenir aux côtés de sa belle. Pour cela, il doit se battre, pour s’en sortir, aux sens propre et figuré du terme. Qui aurait vu Clovis Cornillac dans pareil film ? Pour l’occasion l’acteur a subi un entraînement drastique, agilité accrue, impressionnante musculature, tête à faire peur. Il a visiblement tout fait pour donner un maximum de crédibilité à son personnage. A côté de cela, les combats sont extrêmement bien mis en valeur. Aucune envie de vomissement ne vient gêner le suivi des combats. Toujours idéalement placée, la caméra nous dévoile une action nerveuse, sans temps mort, très bien chorégraphiée. La violence des coups est palpable, tout comme la rage des lutteurs. Comme dit à la sortie du long-métrage dans les salles obscures, Scorpion se situe au croisement d’un Fight Club et d’un Rocky, le côté underground du premier mélangé à la montée en puissance du second. L’aspect spectaculaire du free fight est ici parfaitement retranscrit, nous octroyant quelques rictus de douleur devant la violence des impacts. Les acteurs ne se sont pas économisés. Clovis Cornillac est tout simplement stupéfiant.
La violence d’Angelo découle de sa solitude. Véritable animal sur un ring, l’homme apparaît timide et maladroit devant une femme. Le clodo veut plaire. Le boxeur alcolo veut être respecté, sans oublier ses erreurs du passé. Pour lui donner la réplique, Karole Roucher est attendrissante en mère célibataire. Dévouée à son fils le jour, celle-ci se résout à franchir le pas de la prostitution la nuit. De petits extras, en sus de son boulot, dont l’unique but est d’assurer le lendemain de Mylan. Tout comme Angelo, nous nous prenons d’affection pour elle, pour son histoire. Scorpion nous fait suivre le destin de plusieurs protagonistes, Elodie, Moïse, Marcus. De moindre envergure, ils amènent à former un ensemble tout à fait cohérent, et d’actualité. Les acteurs n’occupent pas nécessairement le top du cinéma français, mais ils sont tout à fait convaincants, et ce grâce à un saisissant naturel. Il s’agit là de la principale qualité du film : tout y est naturel. Nul ne surjoue. Encore une fois, le personnage d’Angelo est touchant. Clovis Cornillac y excelle, au point de se demander s’il ne devrait pas se cantonner à ces rôles peu loquaces, un peu bourrus mais attachants.
Scorpion étonne par sa puissance. Le spectateur reçoit les coups avec le héros. Les affrontements ont rarement été aussi bien filmés. Mais Scorpion est surtout une belle histoire de rédemption, d’un homme prêt à se battre par amour et pour s’en sortir. Julien Séri donne, d’un côté, un cours de cinéma à tous les réalisateurs d’action et de l’autre une leçon de vie et d’espoir aux spectateurs. Un film coup de poing.