Utopiales 2022 : les courts-métrages

Avis de Vidok

Première session de qualité. 0% est d’un délicieux cynisme, et tente de nous montrer qu’à trop nous reposer sur la technologie, nous risquons quelques déconvenues. En l’occurrence ici lors du “simple” entretien de chambres d’hôtel. Je retiendrai également, et surtout Babel. Se déroulant dans une station spatiale, Babel pourrait en rendre certains claustrophobes. Malgré l’ambiance anxiogène, il réussit à nous faire sourire lors d’une phase de dialogue étonnante. Aussi étonnant que cela puisse être, le film a été réalisé sans effets spéciaux en post-production. Les décors n’ont pourtant aucun mal à être crédibles. Il s’agit qui plus est d’un court-métrage français, qui n’avait pas réussi sa campagne de financement participatif. Mon coup de cœur de cette sélection, assurément. N’oublions pas Camouflage tout aussi cynique et glauque que ses petits copains, mais en animation. On suit avec intérêt l’histoire de cet employé de bureau tentant de cacher sa véritable nature. Le dernier que je retiendrai est Census, schématisant les processus de censure. Amusant. Cette première session comprend pourtant le vainqueur de la compétition, New Babylon. Et même après l’avoir par deux fois, je ne saisis toujours pas son intérêt, mis à part peut-être l’idée de sa ville contenue dans des anneaux rotatifs. Et encore…

Avis de Mizakido

• 0% : un bien cynique premier court-métrage pour se mettre en jambe, avec une référence évidente à la pandémie des années passées et l’obsession de la propreté.
• A Goat’s Spell : un peu bordélique, il semblerait que ce court, réalisé en mode « 3D rudimentaire », est très porté sur la réalité virtuelle et pensé pour être visionné avec un casque. A moins qu’il s’agisse d’une simple allégorie aux pour l’instant assez fumeux métavers ?
• All We Knew And Ever Loved : une belle démonstration technique pour une histoire sans narration auditive pas des plus claires. Au moins, la musique très rock accompagne parfaitement tout ça.
• Babel : Le Dernier Matin du Jour : sans doute le meilleur court de cette session, avec une réalisation très cadrée et excellente pour une idée généralement très intéressante et quelque peu déconcertante.
• Camouflage : seul film d’animation traditionnel de cette session, Camouflage est une plutôt convaincante réussite, bien écrite et bien rythmée, pour le peu que l’on aime la direction artistique.
• Census : objet véritablement comique de cette session et comme l’indique Vidok, ce court critique particulièrement bien les processus de censure, facilement applicables dès qu’il y a de l’argent à la clef. Plutôt grinçant !
• New Babylon : pourquoi ce court a été salué par le jury reste une énigme. Malgré un visuel assez sympathique, le film se noie dans un scénario vague, sans enjeu et avec un ressort comique assez poussif. On s’est un peu ennuyé quand même.

Avis de Vidok

Dans cette seconde session, le mastodonte se nomme Cognition. Un court-métrage de 27 minutes avec notamment Andrew Scott (Série Sherlock, 007 Spectre, …). Mais nous n’en parlerons pas, car malgré ses moyens visiblement bien supérieurs à ceux des autres, la demi-heure nous a paru bien longue… Je retiendrai plutôt Apotheosis. Seuls les meilleurs humains ont le droit de vivre dans la première colonie spatiale. Les humains sont depuis longtemps augmentés, mais pas Selene qui va tenter de faire jeu égal avec eux pour gagner le droit de partir dans l’espace, et accessoirement sortir sa famille de la pauvreté. Malgré un jeu d’acteur plus que perfectible, le propos, les lieux et l’histoire nous accrochent suffisamment. A ses côtés, je retiendrai Cyan Eyed, un très joli film d’animation où un robot tente de sauver une jeune fille des griffes d’une capitaine pirate. C’est dynamique, joli et bien animé. Très classique dans son déroulement, Cyan Eyed est surtout là pour prouver le savoir-faire de son équipe en termes d’images de synthèse. Je donnerai bien une petite mention également à While Mortals Sleep, “creepy” comme diraient nos amis anglophones. Une histoire de réincarnation de Dieu, de sectes et d’eau noire. L’ambiance pesante nous accroche jusqu’au dénouement aussi dérangeant qu’inattendu.

Avis de Mizakido

• Apotheosis : très porté sur la lutte des classes, Apotheosis est une belle réussite aussi bien sur le plan de la réalisation que sur son histoire condensée et globalement très efficace, ce qui pourra faire oublier les quelques ratés quant aux incrustations d’éléments réalisés en post-production.
• Cuties : une sorte d’Happy Tree Friends un peu gore avec des personnages qui semblent tous droits issu de de Human : Fall Flat. Franchement bien réalisé, il fait le travail qu’on lui demande à défaut d’être très subtil : provoquer l’étonnement et un peu de malaise.
• While Mortals Sleep : sans toute la plus grosse réussite de la session, ce court surfe tranquillement avec une certaine maitrise sur le thriller se transformant rapidement en un machin horrifique légèrement dérangeant, qui évidemment, compte tenu de la durée du format, se termine un peu abruptement, et laisse plus de questions que de réponses.
• Cyan Eyed : si mes souvenirs sont bons, ce court a été réalisé grâce à l’Unreal Engine, et cela se voit tellement qu’on semble assister, sur grand écran, à l’introduction d’un futur jeu-vidéo à l’ambiance steam-punk.
• Jeff : ce court nous propose de vivre le voyage d’un drone Amazon livré à lui même alors qu’il était en train d’effectuer… Une livraison. Assez drôle, il présente un côté dystopique plutôt sympathique sans jamais critiquer la célèbre entreprise. C’est sans doute pour cela que la diffusion a été autorisée, vu que la marque est littéralement citée sans arrêt.
• From Beyond : un bien étrange montage de fausses vidéos relatives une invasion extraterrestre, avec au programme, des communiqués des gouvernements, quelques images filmées au portable, ainsi que des archives interdites piquées dans des complexes scientifiques. C’est globalement pas si mal, bien qu’un peu foutraque et quelque peu cryptique.
• Cognition : malgré la présence au casting du terrible Andrew Scott, Cognition rentre malheureusement pile poil dans la catégorie des courts trop ambitieux techniquement au détriment d’un scénario vraiment réussi. Bien que plutôt jolie visuellement, cette remise en question futuriste des autorités totalitarismes manque cruellement de relief, avec un héros quelque peu générique joué par un acteur qui fait ce qu’on lui demande, à défaut d’être vraiment transcendant faire au méchant de Sherlock.