Toutefois, l’élément le plus contestable de Final Fantasy VIII n’est pas son histoire, mais bel et bien son gameplay, que l’on peut autant aduler que détester. Il y a beaucoup de choses à en dire… En premier lieu, sachez que les ennemis s’adaptent à votre niveau. Le level-up est pour ainsi dire presque « inutile » puisque les monstres montent plus ou moins au même rythme que vous, même si bien évidemment, il y en a qui sont plus coriaces que les autres, indépendamment de leurs propres niveaux. Alors, comment faire pour se rendre nettement plus fort que ses ennemis ? Là est la subtilité du système. Vous pouvez choisir vos commandes d’action pour les combats, pour chaque personnage : attaquer, objet, défendre, magie… et voler. Mais pas voler des objets comme on en a l’habitude, ici, on vole la magie de nos ennemis. C’est à dire qu’avec cette commande, vous pouvez absorber une magie de votre choix à un monstre selon celles qu’il a en stock (vous pouvez aussi obtenir des magies grâce à des sources disponibles à plusieurs endroits du jeu). Mais à quoi peuvent-elle vous servir ? Vous pouvez tout à fait les utiliser en combat de manière classique, mais en principe, l’intérêt du système n’est pas dans ce sens. En fait, vous pouvez les associer à l’une des aptitudes de votre personnage selon plusieurs paramètres à prendre en compte, comme le taux de comptabilité. Par exemple, associer 100 magies (100 étant le maximum) Ultima à votre attaque sera plus efficace que de lui associer 100 Soin Max ; et associer 100 Vie Max à votre taux de HP sera plus efficace que de lui associer 100 Fournaise. Vous comprenez bien qu’utiliser des magies associées durant un combat n’a strictement aucun intérêt, puisqu’en contrepartie, cela réduira certaines de vos capacités.
Mais vous ne pouvez pas associer des magies à n’importe quelle caractéristique de votre personnage dès le début. Pour avoir un maximum de possibilités d’association de magie, il vous faut déjà associer des G-Force. De quoi s’agit-il ? En gros, d’une invocation (on retrouve Ifrit, Shiva, Leviathan, Bahamut, Odin et des nouvelles comme Ondine ou Orbital par exemple), qui se rapproche des chimères de Final Fantasy VI, en un peu plus poussé. Vous pouvez obtenir de nouvelles G-Force soit en les volant sur un ennemi précis, soit en les battant, soit par le biais d’une quête annexe. Celles-ci peuvent également vous ajouter des commandes en combat (comme augmenter ou abaisser artificiellement le niveau d’un ennemi pour obtenir un butin que vous cherchez précisément) et augmentent considérablement les possibilités du gameplay, qui dispose, malgré des maladresses notables, d’un énorme potentiel. Ces G-Force peuvent également vous servir d’invocations classiques en combat (à noter qu’elles ont leur propres jauges de vie, indépendantes de celle du personnage qui les invoque), soit en faisant des attaques surpuissantes, soit en émettant des pouvoirs spéciaux (Cerberus vous permet d’utiliser des magies en triple pour tous vous personnages, ce qui est très pratique stratégiquement parlant pour attribuer d’un coup toutes les magies utiles comme carapace / booster / blindage et compagnie qui renforcent vos aptitudes au combat).
Ce système peut cependant vite être biaisé une fois que l’on a compris quelles sont les meilleurs associations possibles, et faire le jeu en entier sans monter de niveau est également faisable. Cela nuit un peu à la cohérence du gameplay, ce qui a tendance à être dommage. Ceci dit, lors d’une première partie et sans s’aider d’internet outre-mesure, il sera difficile d’immédiatement comprendre tout ça… L’autre problème plus flagrant par contre, c’est l’utilisation même des G-Force en combat. Déjà, les animations sont très longues, et ne peuvent être ni raccourcies ni passées. On passe donc beaucoup de temps à les regarder, sachant qu’elles nous servent énormément pendant une bonne partie du jeu… Pourquoi ? Parce que pour certaines G-Force, vous aurez un mode « boost » où, pendant la scène d’invocation, il faudra appuyer le plus vite possible sur une touche de votre manette à certains moments (une sorte de QTE, quoi) ; ce qui vous permettra de produire une attaque davantage puissante et efficace. C’est rigolo au début certes, mais quand même, se farcir d’aussi longues séquences à chaque fois juste pour ça devient vite pénible dans les faits… Mais surtout, le comble, c’est que les G-Force vous seront quasiment inutiles pour les derniers boss alors que vous les aurez utilisées à peu près pendant tout le reste du jeu… Encore un souci d’équilibre en somme, puisqu’à la fin, ce sont les limits qui vous permettront de vous débarrasser des ennemis les plus résistants (la dernière de Squall pouvant enlever d’un coup plusieurs dizaines de milliers de HP)…
Celles-ci sont relativement similaires aux limits breaks de Final Fantasy VII, à quelques nuances près. Déjà, pour pouvoir en profiter, il ne faut pas avoir encaissé un certain taux de coups, mais juste laisser les HP de votre personnage à moins d’un quart de sa vie totale, puis de changer de personnage à chaque fois jusqu’à ce que la commande apparaisse. Ce qui est en fait stupide, puisqu’encore une fois, il est très facile de profiter de ça pour avoir facilement accès à nos limits et les balancer à la figure de nos ennemis de manière répétée… Là où ce système fait mieux que celui de FFVII en revanche, c’est que les limits sont globalement plus interactives. Dans ce dernier, seule l’attaque de Tifa nous faisant interagir, alors qu’ici, elles sont plusieurs à mettre le joueur à contribution. Avec Squall, il faudra appuyer sur les gâchettes au bon moment, avec Zell il s’agira de réaliser des combinaisons de boutons données, etc… Mais bon, encore une fois, on regrette que le gameplay, aussi audacieux et original soit-il, comporte tant de problèmes d’équilibre et d’erreurs de game-design qui rendent ses failles facilement exploitables pour se faciliter grandement le jeu. Enfin, ceci étant, ça n’a pas non plus trop d’intérêt de jouer en essayant d’en profiter constamment, mais ça aurait tout de même été préférable d’avoir quelque chose de plus cohérent : des dernières limits moins abusivement puissantes ou alors moins faciles à utiliser ; ou encore du level-up mieux pensé ou une utilisation plus judicieuse des G-Force, par exemple, n’auraient pas été de refus…
Notons au passage que les magasins diffèrent des RPG habituels. A part les accessoires, vous ne pourrez changer que l’arme de votre personnage. Et pour se faire, outre de l’argent, il vous faudra surtout trouver des éléments et butins bien précis qui seront de plus en plus difficiles à trouver. Une sorte de véritable chasse au trésor s’impose donc pour pouvoir profiter des meilleures armes du jeu ! De surcroit, les ennemis vaincus ne laissent pas d’argent au combat. Pour en avoir, vous êtes en fait régulièrement payés de façon automatique par la BGU, votre université… Pour faire augmenter votre salaire, il faut ainsi passer plusieurs niveaux au « Test de SEED » directement accessible depuis le menu du jeu à n’importe quel moment. Cela consiste à répondre à une série de questions sur les systèmes du jeu qui deviennent de plus en plus ardues. Encore un point d’originalité donc pour le jeu qui tente là aussi de changer de ce qui se fait d’habitude dans le genre. Mais surtout, parlons du Triple Triad, un vrai « jeu dans le jeu »… Il s’agit d’un jeu de cartes bonus, duquel vous pouvez lancer une partie avec la majorité des PNJ du jeu. Quand vous gagnez une partie, vous prenez une carte de votre choix à votre adversaire, et l’inverse si vous perdez… Sachant qu’il y a des règles différentes selon la région du jeu où vous jouez, vous pourrez passer de très nombreuses heures là-dessus, croyez-moi !
L’autre façon d’obtenir des cartes est de transformer des monstres en plein combat. Ceci est parfois difficile, mais les purs collectionneurs essayeront d’obtenir toutes les cartes ainsi, ce qui constitue un challenge de taille ! A l’inverse, un autre mode spécial vous permet de transformer vos cartes en certains objets spécifiques, ce qui pourrait faciliter vos recherches… Outre tout cela, de nombreuses quêtes annexes existent, notamment pour obtenir de nouvelles G-Force, profiter des sempiternels chocobos (évidemment toujours présents) ou éradiquer des boss bonus plus résistants que les autres, mais aussi pour voir de nouvelles scènes scénarisées, ou tout simplement compléter nos collections de cartes. Toutes les faire vous prendra un temps fou, et certaines sont plus difficiles que d’autres. Pour faire le jeu en ligne droite une première fois, comptez sur une bonne quarantaine d’heures, au bas mot. Mais pour le finir avec toutes les quêtes annexes, cela vous occupera largement 80 heures, et encore beaucoup plus si vous utilisez à fond le Triple Triad et visitez le monde de fond en comble pour tout découvrir. Final Fantasy VIII s’impose finalement comme l’un des épisodes les plus complets de la série, et offre par ailleurs un contenu encore bien plus consistant que son prédécesseur. Par ailleurs, outre les enjeux de l’histoire, on appréciera les touches d’humour souvent présentes comme souvent dans la série, et de nombreuses références à l’univers des Final Fantasy en général, ce qui fait toujours plaisir.
Enfin, comment ne pas achever et conclure ce test sans parler de l’OST composée une nouvelle fois par le génie Nobuo Uematsu ? Sincèrement, au début, on pourrait trouver cette bande-son relativement banale, pas si folle que ça, avec des thèmes peut-être inégaux… Mais quand on l’écoute de nouveau, quand on fait bien attention et que nous sommes happés par le jeu… Non, l’OST de Final Fantasy VIII est bien loin d’être banale, simplette, ou ce que vous voulez : c’est un chef d’oeuvre à elle seule, tout simplement. De l’introduction avec le mythique Liberi Fatali jusqu’à la conclusion par la superbe chanson-thème Eyes on Me, comment ne pas être totalement conquis par un travail d’une telle qualité ? Le jeu nous propose probablement les meilleurs thèmes de combat de la série, avec des Don’t be Afraid et The Man with the Machine Gun cultes, mais aussi d’excellents thèmes de boss comme Force Your Way, Maybe I’m a Lion, The Legendary Beast, et bien sûr The Extreme. Les donjons ne sont pas en reste avec le fameux Find Your Way et l’excellent The Castle. On s’évade également via Blue Field,The Oath, Trust Me, ou encore Fisherman’s Horizon. Si Uematsu a décidé de ne pas refaire des thèmes de personnages car il trouvait que ceux-ci manquaient d’impact dans les épisodes précédents, on a quand même le droit à une très belle musique spécifique à Linoa, My Mind. Mention spéciale pour ma part à l’épique The Landing, probablement l’une des meilleures compositions d’Uematsu, pourtant assez méconnue en comparaison avec d’autres. Enfin, le jeu n’est pas avare en pistes plus mystiques évoquant la sorcellerie, qui est au coeur du jeu, avec Fithos Lussec Wecos Vinosec (jeu de mot tordu, qui n’a en fait aucune signification latine, donc ne cherchez pas) ou encore Premonition et The Sucessor. Bref, du bonheur à la pelle… Et j’en passe, car vous citer tous les titres de qualité me prendrait un temps fou… soit, je ne saurai que trop vous conseiller d’écouter cette OST en entier par vous-même !