Bandai Namco aura pris quatre ans pour réinventer sa série phare de RPG. Plus de vingt ans de savoir-faire ont été remis en cause à la suite d’épisodes plus ou moins décevants. Les équipes ont également dit au revoir à leur moteur vieillissant pour enfin proposer une expérience dernière génération capable de tutoyer les cadors du genre. Tales of Arise a la lourde tâche de mériter son attente, hériter de l’aura de ses prédécesseurs et montrer la voie aux autres RPG. La pression a-t-elle été trop forte ? Nous allons en parler de suite.
Au bout de la vallée on entendait le son d’une corne
Les précédents Tales of présentaient l’affrontement entre deux mondes. Arise n’échappe pas à la règle en opposant Dahna et Rena. Les Reniens, plus avancés technologiquement, ont réduit les Daniens en esclavage ces trois cent dernières années. Rena a offert chacune des cinq parties de Dahna à l’un de ses seigneurs. Chacun a pour mission d’extraire le maximum d’énergie astrale de la planète pour l’envoyer sur la planète mère. Pour cela, les dahniens travaillent dans des conditions insoutenables depuis ces derniers siècles. Nous incarnons un jeune homme, amnésique, affublé d’un casque qu’il ne peut retirer, et insensible à la douleur. Ayant des dispositions pour le combat, ce dernier décide, après un an, de se révolter en rencontrant une jeune femme, prisonnière des reniens mais que nul ne peut approcher. Maudite, elle électrocute toute personne la touchant. Cet insolite duo rentre très vite dans les forces de résistance dahniennes, dont l’objectif sera l’assassinat des cinq seigneurs.
Le pitch se veut aux antipodes de l’originalité que nous attendions. Pourtant, Arise se révèle rapidement bien moins manichéen qu’escompté. Jusqu’au point final de son script, le jeu enchaîne les révélations et les rebondissements. La grande force de son histoire tient également dans le temps qu’elle accepte de prendre pour développer ses protagonistes. L’équipe est très vite constituée des six personnages qui nous accompagneront jusqu’au générique. Leur nombre limité nous offre l’opportunité de les découvrir et, malgré leurs différences, et de les apprécier tous autant qu’ils sont. Au fil des heures, nous nous attachons de plus en plus à cet improbable groupe, que tout sépare. Au prix parfois de longs dialogues, ou saynètes entre deux moments de bravoure. Ou de tunnels narratifs dans le dernier quart de l’aventure. Mais qu’importe, le pari est réussi : le casting de ce Tales of Arise est impeccable.
D’un chef ennemi qui rappelait toute sa horde
Impeccable, le système de combat l’est, lui aussi. La série a toujours mis un point d’honneur à proposer des affrontements dynamiques. Arise ne fait toujours pas exception, et son arrivée sur consoles dernière génération lui octroie une animation en 60 images par seconde impeccable et des temps de chargement pour ainsi dire inexistants. Directement affichés dans les environnements, les ennemis peuvent être esquivés, sans trop de complication. Mais leur rentrer dedans est tout de même conseiller pour fluidifier la progression. Nous ne dirigeons que le leader – interchangeable – et devons enchaîner les coups et les artes – limités à une jauge qui décroît à leur utilisation et augmente très vite ensuite. Ça frappe vite, très vite. Tout l’enjeu des combats se trouve d’ailleurs dans notre faculté à maintenir des combos, tout en enchaînant des frappes bonus surpuissantes. Ces dernières peuvent être pratiquées par n’importe quel personnage – même ceux de la réserve – si la jauge associée est pleine. Elle se remplit au fil des coups. Ces frappes sont plus ou moins efficaces selon le type d’adversaire, et peuvent posséder des effets très utiles. Le héros peut mettre son ennemi à terre, quand d’autres peuvent interrompre une magie ou une course.
Et c’est sans compter sur les arts mystiques, de prodigieuses techniques qui font particulièrement mal. Toutes ces possibilités font que l’écran est rapidement submergés d’effets pyrotechniques, rendant, parfois, l’écran difficilement lisible. Notamment contre certains boss un peu volumineux, ou nerveux. Le plaisir de jeu est rarement entaché, l’ensemble restant tout à fait confortable. Arise limite les systèmes puisque tous les artes de soin passent par une jauge commune à l’équipe. La remonter nécessite d’utiliser des objets ou de profiter d’une auberge, voire d’un feu de camp. Sa capacité maximale augmente au fil du temps et des rencontres – ne pas négliger les boss optionnels. Même le système de compétences à débloquer permet de simplement utiliser les points de combat acquis à chaque niveau ou quête annexe terminée sur un arbre.
Avait-il compris qu’on lutterait même en enfer
Tales of Arise, sans en oublier d’être profond, simplifie l’intégralité de ses mécanismes. Swicher d’un personnage à l’autre, remettre sur pied l’intégralité de l’équipe d’une pression sur triangle, équiper ses personnages – une arme, une armure, un accessoire – changer la tenue de chacun sans impacter les caractéristiques, … la liste des éléments de confort est longue, sans omettre la sauvegarde automatique, en plus de la manuelle à tout moment, ou la téléportation d’un bout à l’autre de la carte, déjà découverte, dès le départ de l’aventure. Même le jeu de pêche, indispensable à tout JRPG qui se respecte, préfère privilégier l’efficacité à l’exhaustivité.
Bien que très classique sur le papier, Tales of Arise marque un tournant dans la série par sa modernité. Un peu à l’image de Xenoblade Chronicles en 2010, sur d’autres sujets. En s’appuyant avant tout sur son histoire et ses personnages, en tentant de gommer la majeure partie des tares du genre. D’autres y verront un peu de Final Fantasy XIII, en ce sens-là. Nous ne pouvons que saluer les équipes de Bandai Namco pour avoir réussi à se remettre autant en cause. A l’image du compositeur attitré des Tales of, Motoi Sakuraba, qui livre une performance qu’il n’égalait plus depuis plusieurs années sur la série. Épique, la bande son l’est indubitablement, parfois même un peu trop, peut-être. Mais elle accompagne globalement la progression avec brio, avec quelques fulgurances qui ne sont pas sans rappeler certains airs des Baten Kaïtos. Rappeler seulement, certes, mais nous pouvons dire un joli oui à la bande son.
Et qu’à la tribu de Dana appartenaient ces terres
Nous finirons par l’autre grand oui : la réalisation technique. Cerise sur le gâteau : Tales of Arise offre des panoramas superbes. Enfin des décors “Next Gen” diront certains – même si nous leur rappellerons que le titre est également disponible sur Playstation 4 et Xbox One. Dès les premières heures de jeu, Arise se montre généreux avec des paysages à perte de vue. Toujours fourmillant de détails et de couleurs. Les héros ne sont pas en reste avec leur modélisation mixant 3D et crayonné. Cette représentation alloue des expressions faciales d’une qualité inégalée dans la série, et achevant de rendre les personnages attachants, et vivants. D’autant que, comme cité précédemment, l’animation ne bronche jamais, en tout cas sur Playstation 5 et Xbox Series X. C’est une démonstration de force que réalisent les équipes de Bandai Namco, continuant d’éprouver le moteur déjà à l’œuvre sur Scarlet Nexus sorti quelques mois auparavant. Le seul reproche que l’on peut tout de même formuler à l’ensemble, sûrement en partie due à l’utilisation de l’Unreal Engine, tient dans l’affichage tardif de certains éléments du décor et des ennemis.
Comme à son habitude, l’éditeur japonais s’est alloué les services du célèbre studio Ufotable pour les différentes séquences animées, et les deux openings. Déjà à l’oeuvre sur les derniers titres de la série, ce désormais géant ne faillit pas et offre des séquences de haute volée. Le groupe Kankaku Piero et la chanteuse Ayaka assurent respectivement la première et les deux dernières chansons. Du beau monde.