[dropcaps style=’2′]Du RPG mondialement renommé au jeu de danse, il fallait oser. Sans peur et sans reproche (enfin jusque-là), Atlus se lance sans prévenir dans le club très fermé des jeux de rythme et envoie pour l’occasion la petite troupe de Persona 4 sur le dancefloor.
Pour se faire une place au soleil, Persona 4 Dancing All Night n’ira pas copier ses concurrents et se forge un style et un gameplay bien à lui. Rien que son intro et ses menus résolument «disco» donnent le ton : on est très loin de l’ambiance Vocaloid. La présentation générale est un énorme hommage aux années folles d’avant que l’on soit nés. Entre autres curiosités, la boutique d’accessoires se présente comme un télé-achat avec un Pierre Bellemare nippon presque aussi volubile que l’original! Le menu «collection» qui permet de consulter ses records se présente sous forme d’une étagère de 33 tours, et l’écoute des musiques se fait via un bon vieux jukebox. Mention spéciale à ce dernier qui continue à jouer même quand la Vita se met en veille. Simple mais il fallait y penser.[/dropcaps]
Autre particularité : (presque) toutes les chansons sont en anglais. Foudroyé, le joueur de Project Diva appréciera néanmoins quelques excellentes compositions. Time to Make History possède une pêche phénoménale et Snowflakes, Shadow World, Best Friends (+ une dernière que l’on abordera plus loin) sont très bonnes dans leur style avec des rythmes endiablés. Seulement voilà, ce ne sont qu’une vingtaine de chansons originales dont on dispose in-game, plusieurs étant remixées pour grossir le mode Free Dance. Du point de vue des personnages, là encore Persona 4 Dancing All Night fera un peu grincer des dents car chaque chanson est réservée à un seul personnage : impossible de jouer ses musiques préférées avec ses personnages préférés. Un Intuitu Personae bien regrettable, car le jeu est extrêmement beau et bien animé. En revanche, les chorégraphies apparaissent très classiques, un peu terre-à-terre comparé à l’inventivité des clips d’un Project Diva F, ou même au côté artistique de IA/VT Colorful.
D’un point de vue plus personnel, je suis atterré par le choix de faire apparaître Naoto uniquement dans sa version du Persona 4 original. Je m’explique : comme je ne fais jamais rien comme tout le monde, je suis entré dans la série Persona par le manga Persona X Tantei Naoto. Dès lors pour moi, Shirogane Naoto, c’est ça. Donc quand on me la montre habillée en mec, avec une voix de mec, qui plus est dans un jeu de rythme où le côté visuel et sonore est primordial, je dis non avec toute la force que mon statut de monsieur-tout-le-monde me confère. Plus largement et c’est assez rare pour des voix originales, le casting japonais de Persona 4 Dancing All Night m’a laissé plutôt interdit.
Je ne suis pas super bon à Persona 4 Dancing All Night, mais pour ma défense, je dirais que sa jouabilité ne l’est pas totalement non plus. Les boutons à presser sont renseignés sur les bords de l’écran et les icônes en mouvement sont neutres. Du coup, il n’est pas évident de s’y retrouver, d’autant plus qu’il faut en même temps apprendre à gérer le scratch avec les boutons de tranche. Pas de panique cependant : comme toujours un temps d’adaptation suffit pour installer les repères cognitifs dans son cerveau et devenir un maître des platines, au moins en mode normal. Gros point noir : l’absence de code couleur. Si Sony a mis des couleurs sur les boutons Playstation, c’est pas pour rien! Tout cela fait de Persona 4 Dancing All Night une expérience rythmique moins naturelle que ses principaux concurrents.
Valeur ajoutée indéniable par rapport à ses rivaux, Persona 4 Dancing All Night embarque un mode histoire extensif. Plusieurs internautes sont portés disparus alors qu’une vidéo glauque est mystérieusement diffusée sur le net à minuit pile. Venus seconder Rise pour son retour sur le scène people, la petite troupe de Persona 4 se retrouve projeté dans un monde parallèle où ils vont tenter d’identifier le coupable et secourir les victimes. Même s’il a ses longueurs voire ses lourdeurs, notamment par sa narration en off bien trop présente et sa progression trop structurée, il contient suffisamment d’humour et de suspense pour renouveler l’intérêt, sans parler de sa mise en scène malicieuse avec quelques cinématiques fichtrement bien fichues et de nombreuses illustrations aussi improbables que marquantes.
Je vous disais plus haut que Persona 4 Dancing All Night restait à l’écart de la mode Vocaloïd, mais en fait pas tant que ça. Car quand on parle musique et PSVita, Hatsune Miku n’est jamais très loin. Atlus vous proposera en effet d’ouvrir votre porte-monnaie pour une dizaine de morceaux facturés de 0 à 800 yens (comptez jusqu’à 5-6€ chez nous, sachant que deux sont offerts sur le Playstation Store japonais). Le Heaven Remix dans lequel apparaît la diva virtuelle est de la techno hardstyle d’une violence rare mais dont le tempo explosif la rend intéressante aussi bien à jouer qu’à écouter. Et puis la modélisation et l’animation du personnage transcende tout ce qu’on a pu voir dans Project Diva jusqu’alors : ça tue, c’est tellement sublime! Le DLC de Marie, Break Out Of…, se présente comme de la pop classique beaucoup plus sage. Ce dernier est tout de même un sacré challenge de gameplay puisque les icônes vont parfois dans le sens anti-horaire, alors que tout le reste du jeu garde le sens des aiguilles d’une montre.