[dropcaps style=’2′]Pas facile d’arriver quand on a fait la une de la presse à scandale au Japon et ailleurs. Raillé de toute parts à cause de la pagaille des DLC qui a accompagné sa sortie, Tales of Zestiria nous parvient dans un contexte défavorable. Aussi est-il nécessaire de redoubler d’objectivité pour apprécier ce nouvel épisode à sa juste valeur.
Le scénario de Tales of Zestiria ne fait pas dans la complexité et la série repart sur un classicisme qui rappelle les Final Fantasy ou les Dragon Quest d’antant, notamment avec ses donjons consacrés aux éléments, très beau clin d’œil aux années 2000. L’univers de ce nouvel épisode est divisé, comme traditionnellement dans les Tales of, en deux mondes. Le monde des humains, qui vit une époque sombre faite de guerres, d’épidémies et d’intrigues, et celui des Tenzoku, peuple reculé, voire reclus, invisible aux yeux des hommes. Seul humain élevé parmi les Tenzoku, Sorey finit par revenir dans son monde d’origine au hasard d’une rencontre avec la princesse Alicia. Il y deviendra le «Guide», guerrier de légende apparaissant une fois par génération pour chasser les ténèbres et rétablir la paix.[/dropcaps]
Bien que se basant sur une opposition Bien/Mal a priori éculée, l’histoire de Tales of Zestiria étonne et tient en haleine longtemps grâce à une narration et une mise en scène travaillée. Le Guide est un personnage complexe : proche du Jedi de Star Wars, il est est au centre du jeu politique et doit se garder de prendre parti ou de se laisser envahir par ses sentiments, sous peine de sombrer lui aussi dans l’obscurité. Tales of Zestiria renouvelle régulièrement l’intérêt par une succession de sous-scénarii souvent sombres et assez durs car parfois sans happy end, quittant l’angélisme et illustrant de façon très mature le côté sombre de la société humaine. A l’inverse, le jeu divertit toujours autant par ses cinématiques et autres conversations humoristiques, Edna étant probablement le mood maker de l’année. Cette gothic lotita Tenzoku n’arrête pas de chambrer ses camarades pour un résultat détonant qui donne toujours le sourire.
Il manque cependant à Tales of Zestiria un peu de clarté dans sa méta-histoire : trop conceptuelle, celle-ci risque de perdre le joueur notamment sur la fin. Mais ce n’est pas le plus gros problème puisque assez tôt dans le jeu, l’histoire congédie purement et simplement un des personnages, au demeurant central pour le remplacer par un autre. C’est une faute incontestable du producteur Hideo Baba puisque cette transition est tout sauf naturelle. On a carrément l’impression qu’un deuxième jeu est imbriqué de force dans le premier. Un malaise que le scénario additionnel en DLC (gratuit pour toute pré-commande) ne dissipe pas totalement, car très naïf sur la plan narratif.
En termes de gameplay en revanche, c’est encore une fois le jackpot. Votre équipe est composée de Sorey, Rose et quatre Tenzoku. Vous pouvez jouer chacun individuellement dans un système proche de Tales of Graces F : des combos de 3 ou 4 techniques successives auxquels vous pouvez rajouter un sort de magie à la fin, le truc génial étant que plus le combo est long, plus le temps nécessaire à la préparation du sort est court. Cela pousse à prendre des risques et à jongler entre magie et attaques physiques en étant toujours sur le fil du rasoir. En réalité, ce système est celui de Tales of Graces F, mais accéléré 20 fois. Plus que jamais, les combats temps réels sont basés sur l’adresse et l’esquive. Tout le plaisir de le bataille est dans le fait de trouver la petite ouverture dans les assauts monstrueux de l’ennemi : 2 dixièmes de secondes avant c’est trop tôt, et 2 dixièmes de secondes après, vous êtes mort. C’est encore plus prenant que les précédents, l’attention du joueur est mobilisée à 120% tant l’action est rapide et temps de décision court. Gros point noir toutefois, la caméra est extrêmement mal calibrée et cela fait souvent jouer à l’aveugle dans les environnements fermés. Cela ne ruine pas les combats pour autant, mais c’est souvent irritant.
Sorey et Rose peuvent en outre fusionner avec l’un des Tenzoku de l’équipe en prendre une forme angélique dotée des pouvoirs de l’élément en question. Entre autres transformations, la fusion avec Laila octroie une gigantesque épée de feu et Mikurio dote son porteur d’un arc aquatique. Cette forme, appelée Kamui, est d’une puissance nettement supérieure aux persos de base et peut-être utilisée à tout moment dans la limite des BG (points régénérables de la Blast Gauge) des personnages. En revanche, elle réduit le nombre d’alliés sur le terrain et donc les possibilités de soutien. Il faut donc redoubler de vigilance car la perte d’un Kamui met KO les deux personnages en même temps. Mieux pensé que d’autres, Tales of Zestiria est également doté d’un système de soin et de résurrection extrêmement performant qui fluidifie les affrontements au maximum : le Kamui embarque un sort de régénération (qui coûte toutefois un précieux BG), mais surtout Sorey ou Rose peuvent se relever tant qu’il vous reste au moins un Tenzoku avec 1 BG. Esprits éternels, les Tenzoku se régénèrent d’eux-mêmes après un certain temps à l’arrière. Vous pouvez donc rester en jeu assez longtemps et sans aucun temps mort si vous êtes assez agiles pour éviter les assauts violents de l’ennemi, les objets de soin étant quasiment devenus… obsolètes!
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Le Kamui doit utiliser ses BG avec sagesse. En plus du sort de soin personnel sus-mentionné, il a deux possibilités d’attaque après un combo standard. La première est un coup additionnel sensiblement plus puissant que la moyenne qui coûte 1 BG, l’autre n’étant autres que les célèbres hi-ôgi, attaque suprême qui fait dans les dégâts à 5 chiffres! Les personnages de base possèdent bien évidemment le leur aussi, mais c’est sans commune mesure avec la démesure de celui des Kamui. Ceci en autres rend le Kamui diablement jouissif à utiliser : mêmes les combos de base et les magies classiques sont démentes. L’occasion de signaler que Tales of Zestiria se distingue également par un environnement sonore hors du commun. Lors d’un Kamui par exemple, les deux personnages s’expriment en même temps, ce qui donne un effet boeuf à l’utilisation des magies et autres techniques. Le doublage n’est pas en reste et la bande-son est sensationnelle : les thèmes des villes sont très bons, ceux des donjons encore plus et le thème de combat Zavida the Exile donne une pêche folle aux affrontements concernés.
On lit partout le mot «open-world» associé à Tales of Zestiria… Alors non, la série ne passe pas à l’open world avec cet épisode. Il faut arrêter de voir des mondes ouverts partout. Il ne l’est guère plus que Xillia, Vesperia, Symphonia ou n’importe quel autre au demeurant. C’est un JRPG à la progression classique avec des zones qui se débloquent progressivement. Il est d’ailleurs plutôt linéaire, d’une façon qui tire vers l’agacement dans les premiers stades de l’aventure à cause de la mini-carte non désactivable qui pointe tous les objectifs, comme si le joueur n’était pas assez grand pour chercher par lui-même. Heureusement, arrive un moment où le jeu arrête de vous prendre par la main et ne donne plus que de vagues indices pour compléter des quêtes annexes pas si annexes que ça, car il faut toutes les faire. Les donjons sont particulièrement labyrinthiques et tordus, avec leur lot d’énigmes à vous griller les neurones. Le système d’inventaire est hypnotique et complexe : toutes les armes, armures, accessoires ont des compétences associées et celles-ci forment des combinaisons qui en débloquent d’autres. La fusion d’équipement étant quasi-infinie, c’est une activité sans fin et à plein temps qui vous attend si vous voulez l’exploiter avec précision. Encore un très bon point pour le gameplay général de ce nouveau Tales of qui assure donc variété et qualité.
Seule la version PS3 est disponible en import et on se demande bien pourquoi : cette version old-gen manque clairement de finesse et les textures ne cassent pas des briques. En s’approchant de l’écran, on voit que les persos pixellisent carrément! C’est clair, le moteur de Tales of Xillia est au bout du rouleau. Même si le design de certaines villes/plaines reste chouette, on n’a que peu d’occasions d’être impressionné graphiquement. Le jeu assure tout de même l’essentiel, c’est-à-dire ses personnages et ses combats. L’animation est impeccable et assure des affrontements de toute beauté ainsi que des cinématiques de bonne qualité. Orphelin du PS4share, je n’ai même pas pu recourir aux screenshots via le XMB de la PS3, car l’option a été purement et simplement abolie! J’ai failli m’ouvrir les veines tant le manque était insupportable.