– Support de prédilection :
Du côté des consoles portables, ça a été la PS Vita que j’ai le plus utilisée avec quelques rares jeux en dur et pas mal de jeux dématérialisés. Dans ce domaine, la console propose un nombre non négligeable de softs atypiques et exclusifs qui lui forgent déjà une identité propre : en somme, avant de dire que la Vita n’a pas de jeux, prière d’aller voir sur le PSN pour éviter de dire des âneries. D’ailleurs, si la PS3 demeure la console de salon que j’ai le plus utilisée, c’est là aussi surtout grâce à l’offre du PSN. Et j’ai aussi pas mal joué sur PC cette année, principalement des oldies (merci GOG) et du jeu indépendant.
– Top(s) :
— Devil Survivor 2
Devil Survivor 2 est sans doute le dernier grand RPG de la DS. Qui plus est, un Shin Megami Tensei qui met en scène un schéma d’invasion extra-terrestre et qui emprunte son imagerie au style Evangelion, ça intrigue. Voir les démons du Compendium et les traditionnels alignements de personnages cohabiter avec des envahisseurs aux formes géométriques et des plans alambiqués visant à empêcher l’attaque du jour a vraiment quelque chose d’étrange et de dépaysant. Certes, le jeu devient moins original quand il reprend l’excellente recette de son grand frère au niveau du gameplay en se contentant de l’équilibrer et de l’améliorer (un classique chez Atlus). Mais le résultat approchant de près la perfection en matière de T-RPG, on ne va pas non plus se plaindre. D’autant que le système de New Game + incite très intelligemment à faire et refaire le jeu pour affronter la pléthore de boss annexes, compléter son Compendium et explorer les conséquences des multiples choix scénaristiques proposés au joueur. (Et puis l’OST est de Kenji Ito, donc fatalement…)
— Gravity Rush
Gravity Rush est le jeu qui m’aura fait acheter une Vita. Ceux qui connaissent ma réticence extrême à l’idée d’acheter une console avant son deuxième anniversaire (et sa première baisse de prix) sauront qu’il s’agit là d’un exploit. Mais parfois, il suffit juste d’inventer un concept génial : après avoir goûté au contrôle de la gravité et aux chutes libres vertigineuses dans des directions improbables, on a tendance à en redemander. Si on ajoute à ça un vaste terrain de jeu à l’esthétique envoûtante et des petites astuces de gameplay bien trouvées (comme ces cut-scenes façon BD qui prennent en compte la gyroscopie, absolument inutiles et donc totalement indispensables), l’immersion est totale. Certes, le jeu a ses défauts : le scénario reste grand ouvert à la fin de l’aventure et ne répond à aucune des nombreuses questions qu’il soulève, les objectifs secondaires sont redondants et les commandes utilisant l’écran tactile ne sont pas forcément intuitifs. Mais tout ça a bien peu de poids dans la balance face à un sentiment de liberté aussi grisant et au dépaysement inspiré par la découverte d’un univers mystérieux et passionnant. Vivement une suite.
— Journey
En voilà un jeu qui aura fait parlé (et écrire !) en 2012 sur Archaic. Journey clôture en beauté le triptyque de thagamecompany sur le PSN après un flOw malheureusement injouable et un Flower bien planant. Et le dernier-né sera le jeu le plus ambitieux du lot tout en continuant à témoigner d’une simplicité et d’un minimalisme érigés en signature. Véritable voyage (comme son titre l’indique) invitant à l’émerveillement, servi par une bande-son magistrale et une esthétique onirique, le soft propose également un scénario à la fois simple sans être basique et profond sans être pédant. Qui plus est, on sent dans le jeu une maîtrise de « l’écriture » vidéoludique : le jeu ne raconte pas mais qui fait vivre et ressentir, abandonnant totalement un schéma de narration classique pour tout faire passer par l’interactivité. Un gameplay dont le jeu en coopération est un pilier indispensable, permettant une communion insoupçonnable entre des inconnus aux moyens de communication si limités. Franchement, on n’est pas très loin du génie pur. Un seul regret : que l’aventure soit si courte.
— Wadjet Eye Games
Genre que l’on aurait pu croire moribond il y a encore quelques années, le point & click bénéficie pleinement de la vivacité du marché du dématérialisé. Il y a bien sûr l’école du design en haute résolution avec ses sprites énormes et ses décors d’une finesse qui rendrait jaloux certains AAA. La spécialité de Wadjet Eye Games est au contraire de trouver et d’éditer des P&C aux antipodes de cette tendance et dont l’esthétique riche en gros pixels est une célébration constante de l’histoire du jeu vidéo et de l’âge d’or du genre. C’est bête mais quand on a un certain âge, le charme agit instantanément. Cette année, je me suis enfin mis aux charmes poisseux et dystopiques de Gemini Rue et de son scénario dans la droite lignée de la littérature cyberpunk et du roman noir. J’ai aussi découvert le fin mot de l’intrigue de Resonance, à la fois riche en rebondissements, en surprises et en personnages marquants, le tout servi par un gameplay qui joue avec talent sur la complémentarité des quatre protagonistes principaux. Et la fin de l’année a vu la sortie de Primordia dont mon premier aperçu promet énormément : l’atmosphère à la fois post-apocalyptique et gigeresque du jeu a un charme fou. En tous cas, nous risquons fort de parler davantage de cet éditeur sur Archaic cette année.
— Virtue’s Last Reward
Suite du grandiose Nine Hours, Nine Persons, Nine Doors (999 pour les intimes), Virtue’s Last Reward reprend le même principe : neuf inconnus sont enlevés par un mystérieux personnage du nom de Zero et sont forcés de participer à un jeu, le Nonary Game, pour regagner leur liberté. Et on n’est pas là pour plaisanter, les règles devant être scrupuleusement respectées sous peine de mort. Partant de ce postulat de base aux apparences de déjà-vu, émerge un scénario magistral qui joue comme un virtuose d’une galerie de personnages forts, qui multiplie sans cesse les références intelligentes aux grands classiques de la science-fiction et aux théories scientifiques (ou pseudo-scientifiques) de pointe, qui pousse toujours le joueur à construire et à réviser ses théories personnelles à mesure que les (innombrables) révélations fleurissent et que se posent de nouvelles questions… On ne va pas se mentir : si un soin tout particulier a été apporté aux énigmes et aux puzzles, c’est le côté Visual Novel du jeu qui prime, servi par une écriture et une localisation exceptionnelles. Cette narration qui donne une large latitude aux choix du joueur offre un étrange mélange d’anticipation, d’humour et d’horreur qui fait définitivement la marque de la série des Zero Escape. Pas handicapé par une technique aux fraises, Virtue’s Last Reward est à n’en pas douter un grand jeu qui happe sans pitié le joueur pendant plus d’une quarantaine d’heures, ce qui rend d’autant plus incompréhensible le fait que les tests du jeu se fassent si discrets sur les grands sites spécialisés… Faites passer le mot.
– Flop(s) :
— Des grosses productions de plus en plus ternes
L’avantage de sortir son bilan de l’année après tout le monde, c’est qu’on a pu tâter la température de l’eau avant de se lancer. Et cette année, le trio de tête qui semble se détacher assez unanimement est pour le moins surprenant : Journey, The Walking Dead et Dishonored. Deux « petits » jeux dématérialisés, un jeu issu d’un studio de taille réduite (français qui plus est) et pas de véritable AAA. Bon, on va encore le répéter pour que les choses ne prêtent pas à confusion : un top, ça ne vaut que ce que ça vaut, a fortiori quand il n’est pas constitué avec une méthodologie aussi transparente et objective que celle de Metacritic (oui, il se pourrait qu’il y ait un peu de sarcasme dans la dernière proposition). Mais on ne parle pas ici que des tops de ces obscurs petits blogs qu’il est parfois de bon ton de mépriser quand on est un gros du secteur : il s’agit de bilans de grands sites pro, de récompenses délivrées par l’industrie et de sondages réalisés auprès de grosses communautés de joueurs. Certes, l’un ou l’autre rajoutera les derniers Call of Duty, Assassin’s Creed et Mass Effect en date pour la forme, mais c’est le tiercé cité au début qui semble avoir vraiment marqué les esprits cette année.
Mais pas d’emballement, l’ensemble du petit monde vidéoludique n’a pas enfin décidé de s’intéresser à autre chose que du blockbuster sur-calibré par les services marketing : le AAA n’a juste pas proposé grand-chose de vraiment mémorable cette année. Un nouveau Resident Evil numéroté est bien sorti, mais il a semblé davantage évoquer l’indifférence généralisée que l’outrage ou l’enthousiasme. Pareil pour Final Fantasy XIII-2. Il faut croire que trop de suites finit vraiment par tuer la suite. Et je vais éviter de me lancer tout de suite sur Darksiders 2 que les gros sites semblent avoir été bien les seuls à aaadoooreeer. Du coup, que voulez-vous, il faut bien se rabattre sur les restes pour parler de quelque chose, principe des vases communicants oblige. Si ça permet à des jeux plus obscurs de faire parler d’eux, tant mieux. Espérons juste (sans vraiment trop y croire, hein…) qu’une partie de cet intérêt soudain pour les « petits » jeux survive en 2013 à Bioshock Infinite et Grand Theft Auto 5.
— Des éditeurs véreux qui prennent de plus en plus leurs aises (enfin, surtout Capcom)
Quitte à virer dans la fixation et la redite (j’avais déjà abordé le sujet l’année dernière), les choses ne s’arrangent pas vraiment de ce côté-là. Je sais, j’en parle beaucoup, peut-être trop. Mais le silence de la presse et du web spécialisés sur ce sujet étant toujours aussi assourdissant, il faut bien pousser une gueulante de temps en temps, ne serait-ce que pour libérer la tension accumulée. Je vais passer rapidement sur les cas de Square-Enix et de Nintendo qui semblent s’être récemment découvert un goût prononcé pour le DLC ou le patch correctif. On pourrait même les féliciter d’avoir tenu aussi longtemps si cet alignement tardif avec le reste du marché en matière de pratiques mafieuses méritait la moindre éloge. Je ne vais pas non plus aborder le cas de Darksiders 2 et de THQ, ce sera pour plus tard.
Non, non, parlons gros morceau, parlons Capcom. Ah, Capcom… Le croirez-vous ou non, mais c’était autrefois une grande compagnie qui a édité grand jeu sur grand jeu. Enfin, c’était dans mon jeune temps : ça commence à dater. Et depuis, cette société est devenu une espèce de grotesque clown de l’industrie vidéoludique qui fait rire tout le monde dès qu’elle sort un jeu ou qu’elle fait une annonce. C’est bien simple : depuis quelques années, on se demande s’ils ne le feraient pas un tout peu exprès. Bon, comme ses autres petits copains, Capcom n’a rien sorti de bien mémorable cette année, à l’exception de Asura’s Wrath que j’ai eu la lucidité de prendre à moitié prix d’occasion. J’avoue : une pressante envie de faire de l’achat de seconde main un moyen de priver l’éditeur de mes sous a guidé ma main. Enfin, ça et les doutes que je nourrissais quant à l’honnêteté de proposer une pléthore de DLCs pour « compléter » un jeu dont la durée de vie ne dépasse pas les sept heures, bien entendu.
Et autant le jeu est un délire jouissif de tous les instants que j’ai adoré du début à la fin, autant il donne aussi à l’expression « fin en DLC » une dimension que même les truands de chez Ubisoft et de Konami n’avaient pas osé approcher avec l’épilogue du Prince of Persia de 2008 ou les derniers chapitres de Castlevania Lords of Shadow. « Dernier quart du jeu en DLC » serait plus exact, à vrai dire, voire « dernier quart du jeu teasé sans vergogne dans la True Ending disponible sur la galette ». Ce jeu est une honte innommable d’un strict point de vue de commerciale autant qu’il est un torrent de jouissance what-the-fuckesque par ailleurs. C’est peut-être ça le talent du Capcom d’aujourd’hui : transmuter l’or en immonde bousasse comme le plus raté des alchimistes de bazar. Inutile de préciser que j’attends avec une appréhension certaine qu’ils éditent le Remember Me des français de chez Dontnod que je suivais alors que le projet s’appelait encore Adrift. Ca risque malheureusement de saigner à nouveau dans les bilans de 2013…
— La presse spécialisée (ou l’art du dialogue de sourds)
On peut dire qu’il y a eu du gros pavé dans la mare de la presse spécialisée (tant web que papier) cette année. DoritosGate, naufrage de MER7, déclarations chocs d’Usul, articles sur Merlanfrit… On peut dire que ça a tangué et qu’il y a eu des vagues. Mais la palme du ridicule peut sans doute être attribuée à la confrontation de cour d’école entre les représentants de Gameblog et de Gamekult lors du débat qu’Arrêt sur Images avait fort opportunément consacré au sujet de l’indépendance de la presse spécialisée. En résumé : les deux camps s’envoient mutuellement à la tête des accusations même pas assumées de collusions avec les éditeurs et de « ménages » après avoir sorti la bouche en cœur qu’au niveau de l’indépendance des rédactions, tout va très bien madame la marquise. Là où ça devient un poil irritant, c’est quand certains suggèrent régulièrement à mots plus ou moins couverts que tout irait mieux si ces sales petits sites et blogs du grand Satan Internet ne dévalorisaient pas le travail des gros et ne leur faisaient pas une concurrence déloyale en ayant le culot d’être vraiment indépendants des gros éditeurs, tout en restant dans l’écrasante majorité des cas gratuits.
Sur Archaic, on n’a pas vraiment abordé le sujet de la presse et de ses dernières polémiques en date, sans doute parce qu’on n’avait pas vraiment grand-chose de constructif à apporter au débat. Après tout, les arguments ont tendance à rapidement tourner en rond. Mais croyez-moi quand je vous dis qu’on en parle entre nous (beaucoup, et surtout Ced). Mais comme un bilan de l’année est l’occasion rêvée de vider son sac, je vais quand même poser la question qui personnellement me turlupine : quel est au juste le rôle de cette « grande » presse qui donne des leçons à tout le monde ? La logique voudrait que ce soit d’informer ses lecteurs, mais la transposition de ce bel idéal dans les faits me laissent vraiment dubitatif. Je vais par exemple abonder dans le sens de Ced : on se dit parfois en lisant des tests qu’il vaut mieux être un jeu AAA soutenu par un gros éditeur qu’un jeu indépendant. Paradoxalement, on vous en demandera moins, qu’il s’agisse d’originalité, de qualité d’écriture ou de finition. A croire que quand on est journaliste pro, on ne peut se permettre l’indépendance que dans certains cas de figure, quand les budgets publicitaires ne sont pas trop menacés par les excès d’objectivité. Et c’est sans parler de certains points que j’ai survolés plus haut, de certains très bons jeux totalement zappés au sujet récurrent des bugs et DLCs même pas abordé. Et ne parlons même pas des polémiques et des petits scandales qui agitent le milieu de la presse en général et des questions que tout cela pose : ce genre de petits problèmes, on considère unilatéralement que ça n’intéresse pas le lectorat et on ne le traite pas. On ne peut s’empêcher de constater que sur certains points, la presse fait mal, si ce n’est pas du tout, son boulot.
Enfin bref, je suis sûr que ces « petits » (dont Archaic s’enorgueillit de faire partie, merci beaucoup) arrivent à aborder certains sujets de manière plus libre, plus indépendante et plus complète. Après tout, nous ne sommes pas forcés de passer notre temps à entretenir des réseaux de copinage avec les services marketing ou de quémander moult espaces publicitaires auprès de ceux dont nous critiquons les jeux, ça doit quelque peu jouer. Tout ça me navre parce que j’ai découvert le jeu vidéo il y a vingt ans grâce à la presse. On ne va pas se mentir, elle était d’un amateurisme absolu. Il faut dire qu’à l’époque, personne n’avait la légitimité qu’apportent une carte de presse ou des diplômes de journalisme pour prouver son statut de professionnel et pour étayer ses procès en déontologie. Depuis, il faut croire que les choses ont bien changé, hein ? Bref, à l’époque tout était une question de passion et de connaissances accumulées sur le tas, et d’une certaine manière je ne peux pas m’empêcher de penser que les héritiers de cette presse qui faisait découvrir les jeux et qui donnait envie d’y jouer, ce sont davantage les amateurs du web que les professionnels dont le travail se réduit trop souvent à un guide d’achat basé sur des critères pseudo-objectifs assorti d’un flux continu des mêmes news qu’on voit défiler partout. Fin du coup de gueule.
– Déception :
— Darksiders 2
Je ne vais pas radoter plus que de raison sur la nullité intrinsèque du jeu (d’autant que je l’ai déjà fait ici en long, en large et en travers). Non, ériger Darksiders 2 en déception de l’année, c’est surtout l’occasion de faire le point sur mon changement de perspective sur le jeu vidéo. On pourra dire que le jeu m’a vacciné du blockbuster et de la grosse production. Comme je l’ai écrit un peu plus haut, l’offre en la matière n’a déjà pas vraiment été mirobolante cette année. Et ce qui a été offert a été d’une manière générale (comme d’habitude) pourri par les DLCs et les bugs en tous genres. J’ai eu un rapport véritablement affectif au premier Darksiders, par la générosité du jeu certes, mais aussi par sa philosophie à l’ancienne : pas de online, donc aucune des dérives malsaines associées du style patch corrigeant l’incompétence (ou l’absence) des testeurs ou jungle de bonus de pré-commande qui rend les contours du jeu bien flous. C’est bien simple : le seul bonus de pré-commande du premier jeu était accessible à tous les joueurs à partir du moment où ils rentraient un mot de passe dans les menus du jeu, façon cheat code à l’ancienne.
Le premier jeu avait donc établi la confiance et j’ai acheté sa suite au prix fort alors qu’en tant que joueur un peu au courant, j’aurais pu dépenser beaucoup moins cher sur le net. Pourquoi donc ? Eh bien, tout simplement pour soutenir un THQ à la santé économique précaire. La suite, on la connaît : là où un Squaresoft au bord de la faillite se défonce pour sortir le premier Final Fantasy, THQ démontre tout son talent à abuser de la confiance de ses clients en vendant au prix fort un jeu inachevé et incomplet. Bref, vous vous doutez que même s’il est de bon ton de se lamenter sur le naufrage des entreprises de jeu vidéo, je ne vais pas pleurer sur celui de THQ. Ils ont fait leur lit, qu’ils s’y couchent.
Mais la conclusion que j’ai tiré de tout ça, à tort ou à raison, c’est que l’air du temps a irrémédiablement contaminé le milieu du jeu vidéo. Se sortir les tripes pour faire le meilleur jeu dont on est capable avant de couler, c’était bon il y a vingt-cinq ans. Aujourd’hui, on préfère limiter la casse en jouant sur la passion et la confiance d’une poignée de gogos qui auront fait l’erreur de vous suivre. Ca fait déjà des années que je peste contre les jeux en kit ou/et à peine débugués qui se multiplient encore et encore dans les étals, mais il faut croire que pour consolider un changement de perspective sur le milieu mainstream du jeu vidéo, il faut davantage qu’une simple constatation froidement intellectuelle des abus de chacun : il faut attendre que les choses deviennent d’une certaine manière plus personnelles. J’ai passé ce cap cette année, grâce à Darksiders 2. Pas forcément uniquement pour le pire d’ailleurs, créer un vide permettant de chercher de nouvelles expériences de jeu pour le combler. Ce qui m’amène naturellement au point suivant…
– Coup de cœur :
— Le jeu dématérialisé en force
Pas de jeu unique pour ce coup de cœur, mais plutôt un phénomène incarné par une pléthore de jeux à la durée de vie souvent courte. Pas de débauche d’effets spéciaux ou de moyens pharaoniques non plus et des styles qui vont du shoot’em-up (Sine Mora, Super Stardust Delta, Retro-grade d’une certaine manière) au jeu de plates-formes 2D (Sound Shapes, Mutant Blobs Attack!!!) en passant par le point & click (les Wadjet Eye Games déjà cités plus haut, Botanicula) et des genres vraiment atypiques (Tokyo Jungle, Quantum Conundrum, Sword & Sworcery, Escape Plan, The Unfinished Swan, Puddle)… Autant dire que la gamme est large, et c’est ce qui fait une grande partie du charme de ces jeux glanés sur le PSN ou sur GOG, ou à l’occasion d’un Humble Indie Bundle.
D’ailleurs, j’aimerais saluer le bon esprit qui imprègne ces deux dernières plate-formes de distribution au même titre que j’ai vivement critiqué les pratiques de leurs concurrents plus friqués. Pas de DRM, des tonnes de goodies en cadeau, des prix très accessibles… Sans même parler du rôle salutaire et actif de GOG dans la préservation du patrimoine vidéoludique : les vieux jeux y sont livrés dans des versions compatibles avec les configurations les plus récentes et des forums qui permettent de cibler et résoudre les problèmes techniques sont mis à la disposition de tous. Heureusement que quelques acteurs plus modestes du milieu redonnent un peu confiance dans l’avenir, d’autant que la montée en puissance du financement participatif direct des studios sans passer par la case gros éditeur laisse espérer des développements intéressants pour les années suivantes.
Mais revenons aux jeux. Puisque GOG m’amène naturellement sur le terrain du vieillot et quitte à passer pour un réactionnaire nostalgique, cet essor des jeux à micro-budgets rendu possible par les plates-formes de téléchargement me rappelle une époque qui m’est chère, celle de la micro-informatique de la fin des années 1980s et du début des années 1990s. A cette époque, les équipes de développement étaient faméliques, les genres étaient moins rigides, tout restait à inventer et on n’avait pas peur d’oser, même au risque de se vautrer royalement.
Il faut croire qu’avec l’évolution du jeu vidéo au cours des vingt dernières années, on a eu tendance à se convaincre que tout a déjà été exploré en matière de gameplay et que sans équipe d’au moins cent développeurs ou sans budget de plusieurs millions de dollars, point de salut. Une impression heureusement battue en brèche par la vigueur du jeu dématérialisé à budget modéré. Seul regret : qu’à cause d’un modèle économique idiot centré sur le toujours plus vite / toujours plus beau / toujours plus fort, le jeu « de moyenne gamme » (certainement pas AAA mais pas vraiment indépendant non plus) doive de plus en plus souvent migrer par la case téléchargement pour être rentable. Mais à part ça, quand elle n’est pas un excuse honteuse des gros éditeurs pour gonfler une fois de plus leurs marges sur leurs AAA, la dématérialisation représente de plus en plus souvent une agréable bouffée d’air frais dans un milieu sclérosé.
– Rattrapage (manqué) :
— Shin Megami Tensei : Nocturne
Décidément, il est bien plus facile de sortir de Nocturne que de s’y lancer. Depuis plus de cinq ans, j’ai le jeu et j’essaye de le boucler, progressant à chaque tentative de quelques donjons avant de lâcher le jeu pour une raison ou pour une autre. Je pensais bien que cette année serait la bonne. J’étais bien lancé, immergé dans l’atmosphère crépusculaire du soft. J’avais pris beaucoup de notes pour mener à bien mes fusions et j’arrivais même à supporter les combats aléatoires incessants et ces archaïsmes de gameplay, typiques des Shin Megami Tensei les plus anciens, qui titillent les limites de l’autisme. Et puis j’ai décroché pour une raison qui m’échappe. Dommage, le jeu a beaucoup d’atouts pour lui mais il n’encourage pas vraiment à lui rester fidèle. Peut-être qu’en 2013…
– Bilan de l’année cinéma :
Année plus faste en matière de film que la précédente (pas difficile, certes). Bon, ne nous emballons pas, j’ai été voir un unique film au cinéma : Prometheus. Loin d’être exempt de défauts et de fautes de goûts, mais j’ai assez peu compris la rage guerrière qui a possédé les « fans » de la licence Alien à l’occasion de la sortie du film et de la pauvreté abyssale de certains arguments. Mais c’est vrai que dès que j’ai droit à des designs de Giger, j’ai tendance à être facilement satisfait.
Dans un registre un peu plus exigeant, je me suis replongé avec beaucoup de plaisir dans les vieux westerns spaghetti de Sergio Leone, Le Bon, la Brute et le Truand (et le reste de la Trilogie des Dollars) et Il Etait une Fois dans l’Ouest en tête. C’est filmé avec maestria, c’est cynique et ça écorne sauvagement le fameux rêve américain, bref, ça a tout pour plaire.
Cette année, j’ai aussi un peu rattrapé mon retard dans la filmographie de Terry Gilliam avec Brazil, Les Frères Grimm et L’Imaginarium du Docteur Parnassus. Si ces trois films oscillent entre le grandiose et le « seulement » bon, on peut facilement dégager une constante : le génie visuel d’un véritable créateur d’univers.
Et enfin, les Utopiales (oui, je sais, on en a déjà beaucoup parlé) ont été une occasion rêvée de découvrir moult films très différents pour le meilleur et pour le pire. La liste a été longue : Iron Sky, Afterschool Midnighters, Voyage vers Agartha, The Human Race, Antiviral, A Letter to Momo… Bref, de la variété et du dépaysement qui font plaisir.